PRINTEMPS 2013 – Vol. 8, No. 1 – www.histoireplateau.org DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU CONSTABLE BEAUDOIN BRUTALEMENT ASSAILLI RICHARD BLASS CAPTURÉ CHEZ SA BLONDE DE LA RUE FABRE UNE PRINCESSE EMPOISONNÉE DES CHAMPIGNONS MAGIQUES DANS LE PARC LA FONTAINE VOIR SOMMAIRE À LA PAGE 3 ÉVÉNEMENTS / PROJETS de la Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-RoyaL Conférences sur l’histoire de femmes exceptionnelles POUR FAIRE SUITE à une première conférence sur Robertine Barry, donnée par Sergine Desjardins le 6 mars dernier (voir résumé à la page 21), nous avons le plaisir de vous annoncer pour ce printemps deux autres conférences sur des d’insoumises. Éva Circé-Côté par Andrée Lévesque Le mercredi 10 avril à 14 h. Entrée gratuite. LIBRE-PENSEUSE, iconoclaste, féministe, Éva Circé-Côté (1871-1949), qui s’est mariée à l’église Saint-Jean-Baptiste et a habité le Plateau, a été une critique intarissable des quatre premières décennies du XXe siècle et a publié plus de 1800 chroniques, tout en travaillant à la mise sur pied de la bibliothèque de la Ville de Montréal. Ses textes viennent à la fois dessiner le portrait d’une femme de lettres et ressusciter son époque. Éva Circé-Côté y défend la raison, la modernité, la séparation de l’Église et de l’État, comme elle dénonce la corruption et le militarisme. Judith Moreau de Brésoles par Guylaine Massoutre Le jeudi 2 mai à 14 h. Entrée gratuite. HOSPITALIÈRE de Saint-Joseph, cofondatrice de l’Hôtel-Dieu de Laval (France), fondatrice et première supérieure des religieuses hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Montréal, Judith Moreau de Brésoles (1620-1687) s’enfuit du château paternel à l’âge de 25 ans pour soigner les malades à l’Hôtel-Dieu de La Flèche (Loir), où elle apprend les secrets de la pharmacie. Arrivée au Canada avec Jeanne Mance le 7 septembre 1659, Judith de Brésoles fut reconnue surtout pour son travail d’apothicaire. Dans le jardin des Hospitalières, elle cultive une grande quantité d’herbes médicinales, apportées d’Europe ou aborigènes, pour fabriquer les médicaments nécessaires aux soins des malades. Lieu : Centre communautaire du Monastère, 4450, rue SaintHubert, salle Hilda Ramacière. Réservations : 514 563-0623. Appel à tous : recherche d’objets insolites du Plateau DANS LE CADRE d’une exposition à venir à Pointe-à-Callière, le musée d’archéologie et d’histoire de Montréal, on est à la recherche d’objets insolites qui illustrent la culture ou l’histoire du Plateau. (Voir le communiqué du musée à la page 20 du présent bulletin.) Le journal Place publique au Centre de documentation de la SHGP TOUS NOS REMERCIEMENTS à Andréanne Foucault, que le Centre puisse, grâce à la généreuse collaboration du Centre d’écologie urbaine, s’enrichir des archives de Place publique, le journal communautaire diffusé sur le Plateau entre 1994 et 2006. Fondé par Dimitri Roussopoulos, économiste, politologue, éditeur et environnementaliste, responsabilité et l’engagement citoyens. Publié à la fois en français et en anglais, Place publique abordait tous les thèmes liés à la vie de quartier : patrimoine et histoire, enjeux urbains et environnementaux, logement et pauvreté, Place publique comporte 13 volumes totalisant plus de 200 numéros, soit la collection presque complète qui sera bientôt reliée et offerte en consultation aux amateurs d’histoire et aux chercheurs. Nous nous réjouissons de cette acquisition, qui témoigne éloquemment de la vitalité communautaire qui a cours sur le Plateau, et nous offrons nos plus chaleureux remerciements à M. Roussopoulos et au Centre d’écologie urbaine. Don de livres d’histoire LA SHGP remercie les Sœurs Grises pour leur don de livres d’histoire. Des titres tels que Jeanne Mance au Canada (1937), Le Curé Labelle (1930) et Laurier, sa vie, ses œuvres (1919) viennent enrichir notre centre de documentation. Nous tenons à remercier également Paul-André Linteau, historien réputé, pour son don de 22 livres d’histoire, dont trois de ses propres livres et quatre écrits en collaboration. Tous sont disponibles pour consultation à notre centre de documentation situé au 4450, rue Saint-Hubert, local 323. Tél. : 514 563-0623. Nos coordonnées SOCIÉTÉ D’HISTOIRE ET DE GÉNÉALOGIE DU PLATEAU-MONT-ROYAL Centre de services communautaires du Monastère 4450, rue Saint-Hubert, local 323, Montréal H2J 2W9 info@histoireplateau.org La SHGP a été fondée le 8 janvier 2006 et est membre de la Fédération des Sociétés d’histoire du Québec. La SHGP est un organisme de bienfaisance, numéro 85497 1561 RR0001. page 2 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 Éditorial Sommaire Événements / Projets de la SHGP ........................... 2 Éditorial Richard Ouellet ......................... 3 NOUS AUSSI, ON A NOTRE COMMISSION D’ENQUÊTE Meurtre au Lutin qui bouffe Kristian Gravenor ..................... 4 La police de quartier en 1888 Marielle Signori ........................ 6 Historique des postes de police .................................... 6 Roch Beaudoin, policier Huguette Loubert ....................... 7 Richard Ouellet info@histoireplateau.org Président, SHGP CHARBONNEAU fascine le Québec depuis le début de ses audiences au printemps 2012. On ne vous cachera pas que les travaux de cette commission d’enquête nous ont inspirés dans le choix du thème du présent bulletin. LÀ OÙ IL Y A de l’homme, il y a de l’hommerie, disait saint François de Sales. Une enquête sur la police en 1910 nous révélait que les élections municipales auraient été arrangées dans le quartier Saint-Jean-Baptiste. Qui l’eut cru? Des scandales politiques à la mairie de Montréal! L A COMMISSION Gabriel Deschambault ................ 8 Des champignons magiques Gabriel Deschambault ................. 9 La princesse empoisonnée Kevin Cohalan ......................... 10 Huguette Loubert ..................... 12 Faits divers en « crime »! Robert Thériault ....................... 13 Spectaculaire évasion de Blass Marielle Signori ............ 14 Bombe du FLQ Marielle Signori ....................... 14 Docteur Wilfrid Derome Marielle Signori ....................... 15 Enquête sur la police Huguette Loubert .................... 16 L’ancienne Cour juvénile Marielle Signori ....................... 17 LE PLATEAU-MONT-ROYAL n’y échappe pas. Le territoire fut le théâtre d’événements dignes des Mont-Royal dans les années 50, à la bombe du FLQ dans les années 60 ou à la capture de Richard Blass dans les années 70, rue Fabre. Parmi les personnages qui ont retenu notre attention, mentionnons le docteur Derome, pour son expertise judiciaire dont le FBI faisait appel, ou encore Roch Beaudoin, policier et patrouilleur à Montréal du 19e siècle, dont le souvenir est toujours cher à lire dans le présent bulletin. L’HISTOIRE du corps policier et de la criminalité dans le Plateau a fait partie de la vie de nos parents, nos grands-parents et nos ancêtres. Souvenons-nous et rendons hommage aux victimes d’actes criminels. Et pourquoi pas faire un clin d’œil au défunt journal Allô Police qui nous a inspirés pour notre page couverture? MERCI à Jean-Luc Trudel, illustrateur, pour sa maquette de la page couverture, aux rédacteurs et à Jean-Marc De Nobile, responsable du Musée de la police de Montréal, pour sa collaboration au présent numéro. Vol au dépanneur Marielle Signori ....................... 19 Pointe-à-Callière .............. 20 Conférence sur Robertine Barry Huguette Loubert .......... 21 Guibord ou Gilford? Justin Bur .............................. 22 hef : Kevin Cohalan, Micheline Émond Infographie : Jean-Luc Trudel Jutin Bur, Kevin Cohalan, Gabriel Deschambault, Kristian Gravenor, Huguette Loubert, Richard Ouellet, Marielle Signori, Robert Thériault Conseil d’administration : Richard Ouellet, président, Huguette Loubert, vice-présidente, Marie-Josée Hudon, secrétaire, Robert Ascah, trésorier, Kevin Cohalan, Gabriel Deschambault, Jimmy Di Genova, Ange Pasquini et Marielle Signori, administrateurs Webmestre : Myriam Wojcik Convocation à l’AGA 2013 ...................... 23 Le bulletin est publié quatre fois par année, les 21 mars, juin, septembre et décembre. Devenez membre ................. 24 Dépôt légal : Archives nationales du Québec et Bibliothèque nationale du Canada. La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 3 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU RUE SAINT-GRÉGOIRE GERTRUDE SERVANT ET LE HOLD-UP RATÉ AU LUTIN QUI BOUFFE Kristian Gravenor L e crime montréalais le plus retentissant des années 1950 a eu lieu durant la nuit du 18 au 19 janvier 1953, au 753, rue SaintGrégoire, à quelques Joseph et Saint-Hubert. plus grand-chose à cet autrefois le site du célèbre restaurant Au Lutin qui Bouffe, dont le truc consistait à prendre des photos des clients tendant un biberon de lait à un véritable cochonnet. Le propriétaire maLadif, B.J. McAbbie, 59 ans, alias Burt (ou Bert) McAbbie, était un adepte de la chasse. On prétendait qu’il gardait jusqu’à 10 000 $ dans son coffre-fort. Cette nuit-là, quatre hommes et une femme orchestrent une ruse. La femme va souper au restaurant et oublie intentionnellement son sac à main aux toilettes. Au moment de la fermeture, son prétendu mari téléphone, disant qu’il allait passer sans tarder pour récupérer le sac. Quatre hommes se présentent, dont l’un est en tenue de femme. Le propriétaire n’est pas dupe et porte une arme à feu. Une bagarre s’ensuit, on frappe McAbbie avec Le restaurant Au Lutin qui bouffe (collection SHGP) un pistolet, une balle part et celui-ci est blessé à la tête. Il meurt deux jours après, mais non sans avoir raconté son histoire à la police. Les cinq voleurs se partagent 4000 $, beaucoup moins qu’espéré. Gerry mcKuhen, le petit ami de Gertrude Servant, est immédiatement soupçonné. Or, il s’est déjà enfui et Gertrude refuse de dire quoi ville, où il a fait l’erreur de signer du pseudonyme qu’il a utilisé lors de sa conversation ont trouvé sa chambre et recherché ses empreintes — Gertrude Servant de l’escouade des homicides, dirigée tout au long des années 1950 par le détective très en vue, Henry Bond. (photo de The Gazette, Montréal, le 26 juillet 1954) gardent en prison — en toute illégalité — ne lui permettant même pas de parler à son avocat pendant deux semaines. pLus tard, en Californie, un voyou torontois, Jonathan Dawn, est arrêté pour vol, et ses empreintes digitales bande. La nuit du crime, Dawn a appelé le restaurant d’un hôtel du centre- une fois capturé, Dawn n’hésite pas à dénoncer tous ses complices. Mais McKuhen demeure introuvable. La police dégote son père, vivant sous un faux nom dans mettent sur écoute et, après 18 mois, retrace l’appel au Texas, où le chef de la bande mène une nouvelle vie en tant que père respectable et vendeur de voitures marié à une ravissante page 4 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 Le petit cochonnet (photo Coolopolis) Avis de recherche Service de Police de la Ville de Montréal, le 13 février 1953 B.J. McAbbie cochonnet (Collection Christian Paquin) Allemande du nom d’Erika, qui n’avait aucune idée que son mari était recherché. McKuhen est ramené à Montréal en juillet 1954. et qu’est-iL advenu de Gertrude Servant, impliquée dans le complot dès le départ? Elle est la huitième d’une famille de neuf enfants originaire de la Gaspésie. Elle déménage à Montréal alors qu’elle est une enfant et fugue à l’âge de 13 ans, ne tardant pas à travailler comme liftière à l’Hôpital général de Montréal, aide-coiffeuse à l’Hôtel Mont-Royal et préposée au vestiaire dans un club. En cours de route, elle se lie d’amitié avec Luc Baxter, un beau perceur de coffres-forts. Elle se transforme en femme fatale et commence à sortir avec un propriétaire de club, déclarant à ses amis « Je sors avec ce singe juste pour son cash ». Elle se lie ensuite avec Gerry McKuhen, un escroc d’Irlande criblé de balles. Elle est dans le coup du hold-up au Lutin qui bouffe depuis le début. en juiLLet 1954, Servant, alors âgée de 24 ans, crochète une serrure à la prison de la rue Fullum et saute par-dessus un mur (en compagnie d’une autre détenue de 200 livres). Elle ne jouit que brièvement de sa liberté, avant d’être capturée à nouveau. Son procès débute le 13 octobre 1954, à la suite duquel elle écope d’une peine de dix ans. Sortie de prison en 1963, elle se trouve aussitôt accusée de recel à cause du butin trouvé dans son appartement, mais n’est pas trouvée coupable. On ignore ce qu’elle est devenue par la suite. Le reste de la troupe est inculpée de meurtre, mais évite l’échafaud en marchandant un plaidoyer d’homicide involontaire. Kristian Gravenor est un journaliste montréalais, expert de la petite histoire de Montréal et notamment de son monde interlope. La version originale anglaise de cet article se trouve sur son blogue Coolopolis (coolopolis.blogspot.ca). Il est l’auteur, en collaboration avec son frère John David Gravenor, du livre Montreal: The Unknown City (Arsenal Pulp Press, Vancover, 2003). Traduction de Micheline Émond et Kevin Cohalan. Le photographe montréalais Michel Campeau a retrouvé près de 500 photos prises au restaurant Au Lutin qui Bouffe au cours de 25 ans, avant sa fermeture à la suite d’un incendie en 1972. Il en a publié plus d’une centaine dans la collection in almost every picture, album #10 (Kessels Kramer Publishing, Amsterdam, Pays-Bas, 2011), en vente à 40 $ à la boutique du Musée McCord. Une copie est disponible pour consultation au Centre de documentation de la SHGP. Plusieurs cartes postales du restaurant provenant de la Collection Christian Paquin sont La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 5 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU ANGLE DULUTH ET COLONIALE LA POLICE DE QUARTIER... EN 1888! Marielle Signori Membre du CA de la SHGP IL Y A EU plusieurs postes de police sur le Plateau Mont-Royal et nous pouvons facilement saviez-vous qu’à partir des années 1887, le service de police louait des maisons postes, et ce un peu partout à Montréal? C’EST AINSI qu’entre les années 1888 et 1899, le poste de police No 12 était situé au 340, rue Saint-Hyppolite (maintenant le 4026, Coloniale), à l’intersection de la rue Saint-Jean-Baptiste (aujourd’hui le 72-80, avenue Duluth Est). Cette maison construite en 1885 est toujours là, encore aujourd’hui. Cependant, on n’y poursuit plus les criminels, mais plutôt les goûts et les saveurs de la bonne soupe maison, avec le restaurant façade de pierres de taille au rez-dechaussée et ses pilastres sont ornés de Ancien poste de police No Soupesoup, avenue Duluth (photo : Marielle Signori) DANS LE BOTTIN Lovell de 1887-1888, on remarque à cette adresse le nom du sergent Isaïe Gauthier, ainsi que ses adjoints, F. Beauregard et le sergent intérimaire H. Spedding. Le sergent Gauthier habite d’ailleurs l’étage ferme et déménage au 1174 (aujourd’hui le 4306) Saint-Laurent, près de Vallières, dans une maison construite la même année. Ce poste sera actif jusqu’en 1935, alors qu’il ferme pour des raisons d’économie et le territoire est fusionné au poste 20. HISTORIQUE DES POSTES DE POLICE DU PLATEAU No de poste Emplacement Ouverture Fermeture 12 (1er) Village de Saint-Jean-Baptiste, angle rues Saint-Jean-Baptiste (avenue Duluth depuis 1874) et Saint-Hyppolite (aujourd’hui avenue Coloniale) 1888 1899 12 (2e) 4306, boulevard Saint-Laurent (près de Marie-Anne et Vallières) 1899 1935 14 (1er) 1040, rue Rachel Est, angle rue Amherst (avenue du Parc-La Fontaine depuis 1901) 1892 1989 14 (2e) 1033, rue Rachel Est, angle avenue du Parc-La Fontaine 1989 Actuel poste de quartier 38 15 (3e) Quartier Saint-Denis, 333, rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906), angle rue Saint-Denis 1879 1906 15 (4e) Quartier Saint-Denis, 333, rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906), angle rue Saint-Denis 1908 ? 16 (1er) Quartier Saint-Denis, 333, rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906), angle rue Saint-Denis 1879 1906 19 (1er) Village de De Lorimier, 2151, avenue Mont-Royal Est, angle avenue des Érables 1901 1941 20 (1er) Ville de Saint-Louis (Mile-End), partie sud (1902), 5100, boulevard Saint-Laurent, angle rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906) 1905 1979 21 (1er) Ville de Saint-Louis (Mile-End), partie nord, 5501 à 5511, boulevard Saint-Laurent, angle rue Beaubien 1902 1918 Remerciements à Jean-Marc De Nobile, responsable des communications au Musée de la police de Montréal. Tableau dressé par Richard Ouellet et Marielle Signori. page 6 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU DOCUMENT FAMILIAL REMIS PAR UN RÉSIDENT DU PLATEAU ROCH BEAUDOIN, POLICIER E À MONTRÉAL AU XIX SIÈCLE Armand Beaudoin, né en 1910, père de Michel Beaudoin, fait sa première communion dans un nouveau costume, Huguette Loubert Vice-présidente de la SHGP et responsable du Centre de documentation par sa grand-mère dans son grand-père retraité. M BEAUDOIN, dont la famille habite le Plateau depuis trois générations, a remis à la SHGP un document exceptionnel concernant son arrière-grand-père, Roch Beaudoin. Ce document est un article publié dans le journal La Presse daté du 16 février 1910 et qui est depuis conservé précieusement dans la famille. Il nous raconte l’histoire de son aïeul Beaudoin, policier à Montréal pendant 48 ans. Il porte le matricule 97 et il est sur le point de prendre sa retraite à l’âge de 71 ans. On le dit de haute stature (il mesurait plus de six pieds), et qu’il ne semble pas vouloir courber sous le poids des nombreux jours vécus, a encore l’œil vif, la mémoire alerte, le geste rapide. Le même jour, le journal La Patrie lui rend aussi hommage. ICHEL ROCH BEAUDOIN, né à SaintRoch-de-l’Achigan, entre dans la police en 1862 alors que la frontière de Montréal se situe approximativement à la hauteur de la rue Duluth, voisine du territoire de Coteau Saint-Louis où se développent des villages autour de la tannerie Bélair et les carrières. Mais ceux qui ont le plus de chance d’être admis ont des recommandations signées par le curé, le maire et d’autres VOICI, commenté, l’essentiel de l’article de La Presse : siennes sont signées par l’honorable Louis Renaud, homme politique et sénateur, qu’il a servi comme cocher, ainsi que plusieurs membres connus de son entourage. QUAND ROCH BEAUDOIN postule pour devenir constable, la Ville compte alors 61 policiers. Mais cette année-là, plusieurs postes restent à combler suite à des décès et des démissions. Comme le travail est rare, plus d’une centaine d’hommes se présentent aux examens. APRÈS des examens sommaires, car il ne sait ni lire ni écrire, a de bons bras, , comme le mentionne l’article, il est engagé avec 36 nouveaux membres pour le salaire de 76 cents par jour. Le mariage étant obligatoire, il épouse deux mois plus tard une demoiselle Grégoire de Saint-Roch-de-l’Achigan, son village natal. LE TRAVAIL est exigeant, les rondes à pied fort longues et, à cause du nombre restreint de policiers et des absences fréquentes de ceux-ci, chaque constable fait souvent le travail de deux ou trois. Il n’y a alors que trois postes de police, soit Place JacquesCartier, Square Chaboillez et rue Panet. Sa première ronde a lieu sur les rues SaintUrbain et Dorchester (actuel boulevard René-Lévesque). PENDANT le séjour de la garnison à Montréal, il doit se rendre jusqu’à la ferme Logan pour patrouiller. Il fait partie d’un détachement de 50 policiers qui a bien failli se faire écharper par le régiment qui y est stationné. Il est alors bien connu que les militaires abusent de leur pouvoir et utilisent la (Suite à la page 16) La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 7 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU RÈGLEMENT DE COMPTES LA MAFIA SUR LA RUE MONT-ROYAL… BEN VOYONS DONC ! Gabriel Deschambault Membre du CA de la SHGP EN 2013, on trouve que notre quartier est créatif turbulent, mais dans les années 1970, rare que sa vie était bousculée. Bien Cette photo de 1961 nous Royal à son époque de gloire. CETTE HISTOIRE de meurtre se déroule avenue du MontRoyal en mars 1972, en face de l’église, près de la rue Pontiac, au restaurant New Miss Mont-Royal. Sa grande annonce néon dit « mets aussi le menu traditionnel du restaurant de quartier de cette époque : pizza, spaghetti, charcoal steak, etc. CE FAIT DIVERS, en apparence des plus banals, ne l’est plus du tout lorsqu’on prend connaissance du contexte abracadabrant entourant le déroulement de l’histoire. D’abord, il faut retourner en août 1955, en Italie, en Sicile, dans la ville de Cattolica Eraclea. GUISEPPE SPAGNOLO — un paysan avec une forte personnalité antifasciste et un féroce militant syndicaliste en faveur des droits des agriculteurs — s’oppose aux factions locale qui défendent les intérêts de la bourgeoisie sicilienne qui exploite les bonnes terres. Il dérange ! pas le rater, en plein dans primes, mais le paysage On trame donc son élimination; ce qui est vite fait. Mais la nuit du meurtre, des carabinieri en patrouille dans le secteur remarquent trois hommes cagoulés qui fuient les lieux, dont un qui est désarçonné de son âne et qui abandonne sa monture en cavale. La police retrouve l’âne et par conséquent son propriétaire, Rosario Gurreri, que l’on interroge alors avec attention. Dans l’eau chaude, pas participé à l’assassinat, mais qu’il a prêté son âne à un dénommé Giacinto Arcuri. Celui-ci lui aurait avoué, le page 8 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 lendemain du meurtre, avoir tué Spagnolo, en compagnie de deux complices Leonardo Cammalleri et Leonardo Salvo. La police se met aux trousses des trois compères, mais sans succès. ON DIT que les complices auraient même été cachés (Suite à la page suivante) DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU (suite de la page précédente) par le curé, qui n’aimait pas beaucoup les communistes et qui prétendait que Spagnolo s’était suicidé ! La police avait dit qu’il avait reçu sept balles (ils ne voulaient vraisemblablement pas rater leur coup) !! Ils s’enfuirent vers le Canada, mais furent condamnés, in absentia, à la prison à perpétuité en Italie. Ils ne furent curieusement que peu inquiétés ici. Gurreri, quant à lui, purgea cinq ans pour complicité et émigra au Canada à son tour en 1962, avec les conséquences que l’on connaît maintenant. LA POLICE montréalaise, en découvrant dans la cuisine de son restaurant son corps lourdement amoché et arborant une grosse « en une longue coupure au visage, sévère mais pas mortelle), ne fut pas longue à considérer le meurtre comme une vendetta des Siciliens de Montréal, 18 ans plus tard. Il n’y a pas que la justice qui a le bras long. MAIS quels sont les liens avec l’actualité du crime organisé montréalais de 2013? Simplement pour dire que l’instigateur présumé à la base du complot de Cattolica Eraclea était Antonino Manno, grand-père de Vito Rizzuto. Quant à Leonardo Cammaleri, c’était son beaupère. AUJOURD’HUI, le temps a passé. Les lieux sont maintenant occupés par la librairie L’Échange et, si vous recherchez une bonne histoire policière, vous pourrez peut-être y dénicher Grandeur et misère du clan sicilien au Québec d’André Cédilot et André Noël, qui relate aussi ces faits. LE COIN DU BLOGUE DES CHAMPIGNONS MAGIQUES DANS LE PLATEAU? Maintenant sont plus la chimie la nature, que les drogues des produits de moderne que de la police fut très champignons poussant au parc La Fontaine, en plein cœur du Jardin des Merveilles. Avec leurs formes bizarres et multicolores, on croyait bien avoir trouvé magiques, reconnus pour causer chez leurs utilisateurs des hallucinations aussi étranges que dangereuses. EH BIEN NON! Pas vraiment! Après enquête, les champignons ne sont pas magiques. Mais la magie est tout de même au rendezvous. toute la ville de Montréal). C’est une destination obligée pour les enfants sages (ou encore ceux trop turbulents), lors des beaux dimanches après-midi d’été. UN LECTEUR, monsieur Robert Caron, m’a fait parvenir cette belle photographie, parue en couverture d’une édition du Sélection de 1961. À ce moment-là, le Jardin des Merveilles est ouvert depuis à peine trois ans qu’il est déjà devenu une institution du parc La Fontaine (et même de LE DESIGN unique de cet endroit et les thèmes traités — par l’utilisation des histoires et personnages de contes pour enfants — en font un véritable « parc Il est aussi intéressant de noter que l’ensemble avait été créé et réalisé par les Le coin du blogue de Gabriel Deschambault NDLR Le blogue publie des textes d’intérêt historique, dont celui que nous reproduisons ici. On peut consulter tous les textes en visitant le : http://histoireplateau.canalblog.com/ services municipaux. CE DOIT ÊTRE le côté fantaisiste des concepteurs qui explique les formes comme ici avec l’arche de Noé. Ce n’est pas nécessairement l’effet des champignons magiques de la photo. AU FAIT : pour ceux qui s’intéressent à l’éléphant du Jardin des Merveilles, sachez qu’il est toujours aussi fantôme et que je n’ai pas encore réussi à mettre la main sur une photographie (appel à tous). Tout ce que je sais, c’est qu’il s’agissait d’un éléphant femelle, qui a aujourd’hui 30 ans et qui loge maintenant au zoo de Granby. Son nom : SARAH. Elle serait arrivée au parc en 1982 et l’aurait quitté en 1985 (il s’agit vraisemblablement du deuxième éléphant du parc). La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 9 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU UNE ÉNIGME DU CARMEL LA PRINCESSE EMPOISONNÉE Kevin Cohalan Membre du CA de la SHGP ROYAL, MAIS UNE AUTEURE MÉCONNUE DU PLATEAU NOUS C ’EST BERTHE SÉNÉCAL (18911972), Carmélite de Montréal — en religion Sœur Berthe du Carmel —, qui raconte succinctement les faits, en énumérant les grandes Carmélites de l’histoire de France : Nous terminerons cette liste, dit-elle, qui pourrait s’allonger encore, par la plus illustre de toutes : Mme Louise princesse, tout en étant très consciente de ses faiblesses, adore son père, qui la visite souvent au couvent. Elle cherche dans les austérités du Carmel une voie d’expiation pour lui et pour la France. EN TANT QUE RELIGIEUSE, elle s’abstient de se mêler de la politique — sauf quand les intérêts de la religion sont en cause, ce qui est souvent le cas quand, comme elle, on considère toute opposition au roi comme un quasisacrilège. En raison de sa naissance, de sa vocation et de ses convictions, et malgré le cloître, Thérèse de SaintAugustin émerge en grande au Carmel de Saint-Denis, en 1770, et prit le nom de Thérèse de Saint-Augustin… Pendant dix-sept ans, elle fut un sujet d’admiration par ses vertus d’humilité, de prudence, de douceur et d’aimable gaieté. Elle mourut en 1787, empoisonnée par une poudre mystérieuse qu’elle respira en baisant des reliques envoyées par des inconnus qui en voulaient à « Je suis en droit sa vie… LOUISE DE FRANCE, née en 1737 — sa mère, Marie Leczynska, épouse de Louis XV, avait eu dix grossesses en dix ans — est appelée « Madame de naissance. (« Madame la Carmélite est plus heureuse dans palais.» (Frontispice de la biographie de 1857 où la nouvelle de est publiée pour la là même qui, à ses beaux jours, était à l’origine de la fondation de Montréal). Rendus à l’époque des Lumières, les dévots avaient perdu beaucoup de terrain devant les philosophes : la princesse voit la religion comme une citadelle assiégée. Elle consacre une correspondance « aux à sa défense, si bien que sa nièce Marie-Antoinette (1755-1793) est réputée petite Carmélite la plus son père.) Se démarquant de Saint-Sulpice) ses frères et sœurs par son tempérament vif et joyeux, elle est la première Fille de France EN NOVEMBRE 1787, le parti dévot depuis cinq siècles à devenir religieuse. est épouvanté par un geste qui paraît anodin aujourd’hui : la publication DANS QUELLE MESURE la perte du Canada, par Louis XVI (1754-1793, neveu et même l’effondrement de l’Ancien de Madame Louise) d’un édit de Régime, sont-ils le fait de l’insouciance tolérance, restaurant aux protestants de nombreux droits civiques. L’abbé (1710-1774)? Impossible de le dire. La Proyart, futur biographe de la princesse, déclare — prophétiquement? —, dans un discours prononcé devant le roi, « Aussitôt que vous aurez réhabilité le protestantisme dans votre royaume, votre trône se trouvera posé sur un atterrée. La nouvelle, selon sa biographe carmélitaine, est comme un glaive de douleur qui pénétra son âme et la plongea dans une angoisse mortelle. Elle reçoit le même jour une enveloppe portant l’inscription « Reliques du Père Elle rompit le sceau, et vit un gros paquet de cheveux tout recouverts d’une poudre qui n’était que du poison. l’avait aspirée, et en avait senti les effets immédiatement. Elle n’en dit pas un mot, et la portière la vit jeter vivement le tout au feu. Madame Louise meurt un mois plus tard, le 23 décembre 1787, à la suite des semaines des souffrances atroces. (Sa mort prématurée lui a peutêtre épargné un rendez-vous avec la guillotine.) SŒUR BERTHE SÉNÉCAL parle du mystérieux empoisonnement à deux reprises : dans un premier temps, dans page 10 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 l’œuvre de sa vie, la biographie Mère Séraphine du Divin Cœur de Jésus. Fondatrice et prieure du Carmel de Montréal (1944), et par la suite, dans l’opuscule Le Carmel. Son Histoire. Son Esprit. Sa Vie (1949). BERTHE SÉNÉCAL, née en 1891 dans le quartier Saint-Henri de Montréal, est l’une des premières bachelières montréalaises et une musicienne accomplie avant son entrée en 1914 au Carmel de Montréal, dont elle sera élue prieure en 1956. Bien que son nom page titre — sa vie de Mère Séraphine est anonyme — et que son unique livre soit le remaniement d’un autre publié 36 ans auparavant, elle mérite considération comme une grande écrivaine méconnue du PlateauMont-Royal. Son œuvre transforme radicalement sa source : chaque chapitre, chaque paragraphe, chaque accusés dans ce dernier cas étant les Jésuites!). Un siècle plus tôt, « l’Affaire Louis XIV. Madame Louise elle-même écrivait dans sa dernière lettre, le 17 décembre : Depuis quelques jours, j’ai des grands maux d’estomac, j’avoue que c’est ma faute, j’ai le cœur trop sensible et les nouvelles qu’on m’a apprises de la révocation m’ont fait une peine dont je ne suis pas la maitresse. EST-CE QUE la vénération des religieuses pour Madame Louise les induisait en erreur? Bernard Hours essaie de résoudre la question, en présumant que son décès est dû à des causes naturelles : « La mort de Madame Louise, dit-il, fut si rapide et si brutale le milieu des années que les rumeurs les plus extravagantes coururent. 1950, pendant son Pour les uns, l’édit de priorat novembre 1787 l’avait (Photo gracieuseté du leur un livre nouveau qui respire lui-même cet air de noble simplicité qu’il entend conférer à son sujet. L’HISTOIRE de l’empoisonnement n’est qu’une anecdote que Sœur Berthe raconte en passant. Où l’a-t-elle prise? Pour les novices carmélitaines de son époque, la lecture de la vie de Madame Louise était recommandée, et l’œuvre privilégiée était celle du Carmel d’Autun, publiée en 1857, qui divulguait cet épisode pour la première fois et se trouvait présente dans la bibliothèque du Carmel de Montréal. Le livre était Stanislas Tourel avait été la novice de Mère Raphaël, qui, elle, avait été la novice de Madame Louise elle-même. Pourtant, soixante-dix ans d’histoire et des faits; et, pour les religieuses, la tentation était forte de vouloir ajouter aux autres titres de gloire de l’héroïne celui de martyre. POUR LA PLUPART, les biographes de la princesse n’acceptent pas l’empoisonnement comme un fait établi. Proyart et Grandmaison n’en font pas mention. De tels bruits étaient fréquents à l’époque, ayant couru lors des décès du Dauphin, le frère de Louise, en 1775, et du Pape Clément XIV, en 1774 (les Mère avait été religieuses auraient pu bâtir de bonne foi une légende « à partir d’un petit fait, réel sans doute : peut-être un mauvais plaisant avait-il jugé très spirituel de faire une farce à Mère Thérèse de Saint Augustin dont on connaissait bien la MARTYRE OU NON, Madame Louise est proclamée vénérable par Pie IX en poursuit aujourd’hui. SES DERNIERS MOTS, « qui résumaient naturellement l’ardeur de son caractère Dépêchons. Au galop! En paradis! Quelques-uns de ses propos AUCUNE MOROSITÉ chez Madame Louise : autant par esprit que par naissance elle est Fille de France. Courir deux lièvres à la fois VOICI SA RÉPLIQUE à l’ambassadeur français à Rome, le Cardinal de Bernis (1715-1794), qui voulait savoir, à propos elle soutenait deux causes en même temps : « Je voudrais de tout mon cœur que toutes entendu dire qu’il ne fallait pas courir deux lièvres à la fois. Vous verrez que ce sera l’avocat du diable qui, inspiré par son rusé client, aura levé ce second lièvre pour nous donner le change et nous les faire manquer tous deux. Il serait bien attrapé si cette en donner deux pour un. Vous êtes bien capable, Monsieur, de lui jouer ce tour, et je vous avoue que je l’espère. Mais si cela était impossible, travaillez uniquement pour la vénérable mère Anne de Jésus, et laissez là la vénérable mère Madeleine de Saint-Joseph. Son tour viendra peut-être ensuite, mais il faut que la mère passe (Lettre de 1772) Autoportrait « Votre servante est fort petite, grosse tête, grand front, sourcils noirs, yeux bleus gris bruns, nez long et crochu, menton fourchu, grasse comme une boule et bossue. On dit cependant que depuis qu’elle est revêtue de l’élégant habit du Carmel, il n’y paraît que peu. Elle s’en moque, cela ne lui a jamais rien fait depuis l’âge de raison. Du reste, que vous ne voyiez en elle que son cœur qui (Lettre à la Mère prieure du Carmel de Bruxelles, 1783) Voir les vies de Madame Louise par l’abbé Proyart (1793), le Carmel d’Autun (1857), Geoffroy de Grandmaison (1907, ouvrage couronné par l’Académie française) et Bernard Hours (1987). (Quelques expressions entre guillemets sont empruntées aux deux derniers.) L’œuvre qui fournissait la base pour celle de Sœur Berthe, l’Histoire de Mère Séraphine de été publiée par l’Imprimerie de l’École Catholique des Sourds-Muets, angle Saint-Dominique et Laurier. Remerciements à Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur, auteur du blogue du MesnilMarie, pour la référence à la biographie de 1857, à Mgr Norbert Lacoste et Jean Lacoste, de l’Association des familles Lacoste, pour des renseignements généalogiques relatifs à Sœur Berthe, à Louise Hodder, pour la lettre circulaire publiée lors du décès de sa grandetante Berthe en 1972 par le Carmel de Montréal, et, pour leur aimable collaboration, aux Carmélites de Montréal elles-mêmes. La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 11 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU ANNÉES 1950 TRAFIC DE BÉBÉS SUR LE PLATEAU Huguette Loubert LA VEILLE, les policiers qui à une amie qui tente alors de recueilli la preuve irréfutable qu’ils recherchent. Ils un bébé au réseau des point un piège avec l’aide d’une policière de New York et une autre de Montréal. Me Buller les reçoit au bureau de Me Glazer, situé avenue Mont-Royal. Elles paient 3500 $ avec des billets marqués, plus 50 $ iront ensuite chercher le bébé dans une clinique de la rue Bellechasse. D’autres cliniques incriminées ont leur adresse rue Laval, près du Square Saint-Louis, rue de l’Esplanade, rue SainteCatherine et une autre dans l’ouest de la ville. Il est même arrivé à Me Buller d’aller faire lui-même une livraison à New York en compagnie d’une femme pouvant passer pour la mère. LE LENDEMAIN de l’arrestation de Buller, a lieu une tentative d’enlèvement d’un bébé. La police découvre que le bébé DANS LES JOURS qui suivent, les détails de l’affaire sont à la une des journaux d’ici et des États-Unis. On apprend que plus de 1000 bébés ont été vendus à partir de Montréal vers les États-Unis au cours des dix dernières années pour plus de trois millions de dollars. Une majorité de familles américaines qui ont acheté ces bébés à des prix variant de 1500 $ à 10 000 $ sont d’origine juive et résident à New York. LE 17 FÉVRIER, Gérard Fillion, le directeur du Devoir, met en doute dans un article que justice sera bien faite étant donné que les accusés sont avocats. Il est accusé de mépris de cour et LE CONTEXTE social et religieux de l’époque condamne les naissances hors mariage et les jeunes femmes sont réprouvées par leur famille et la société. Elles sont plusieurs centaines de milliers à donner leur enfant en adoption, de sorte que les orphelinats d’ici débordent. Pendant (Journal La Presse du 18 février 1954) ce temps, aux États-Unis, l’adoption est rendue très barrières de religion, de race, de classe sociale et de revenu. Et cela, même si plus d’un million d’enfants américains attendent pour être adoptés. Les demandes prennent des années à être étudiées quand elles le sont. Les Juifs n’ont pratiquement aucune chance de recevoir une réponse favorable. Ainsi la table est mise pour un les mains d’avocats et les parents adoptifs sont bien intentionnés. page 12 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 À NEW YORK, une trentaine de couples acceptent, avec une garantie d’impunité, de témoigner pour une commission rogatoire qui s’y déplace. Cinq bébés sont rapatriés en attendant que les demandes d’adoption soient légalisées. LA POLICE cherche la tête du réseau, mais s’aperçoit rapidement que plusieurs réseaux se font compétition. Son enquête se porte alors vers les personnes qui les renseignent. Les futures mères sont recrutées dans (Suite à la page 16) DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU LE CARRÉ AUX « DATES » : 1938 ET 1959 DES FAITS DIVERS EN « CRIME » ! Recherches et transcription : Robert Thériault Membre de la SHGP (avec la collaboration de Marielle Signori) souvient? Si pour certains esprits chagrins ça ne rime à faisait vraiment le larron. En fouillant dans les archives du Guide Mont-Royal, nous avons trouvé quelques perles; subtilisées lors de ces années fertiles en événements de LE MYSTÈRE DES BICYCLETTES (Semaines des 3 et 17 novembre 1938, p. 2) Les vols de bicyclettes se font de plus en plus nombreux. Un fait reste à considérer, les bicyclettes volées sont celles qu’on achète à paiements différés et les vols se font quand il reste quelques paiements à faire. Ces articles proviennent presque tous de la même ‘concerne’. Serait-ce dernier numéro, il nous fut révélé que la Pharmacie H. Trudel s’est fait volé exactement vingt-huit bicyclettes dans l’espace de dix ans, et dans des circonstances analogues à celles que l’on révélait la semaine dernière. Un policier qui entreprendrait de tirer cette affaire au clair s’attirerait une promotion... feront probablement voyager dans le temps… SUICIDE CHEVALERESQUE AVERTISSEMENT : Ceci est une transcription des textes de 1938 et de 1959. Nous avons conservé la prose des rédacteurs de l’époque, par souci d’authenticité. La rectitude politique? Ce sera pour la prochaine fois. Autant vous avertir tout de suite, certains propos pourraient en choquer plusieurs. (Semaine du 17 novembre 1938, p. 2) Le cheval du Clos Moderne, situé rue Marie-Anne près de De La Roche, ‘défuntissait’ la semaine dernière, alors que tirant que tirant sur sa leste, il s’étrangla graduellement, jusqu’à ce que mort s’ensuive... comme dans les commutations de dame justice... ce que c’est que de n’avoir assez d’intelligence pour savoir quand ça fait mal. LES APACHES ATTAQUENT (Semaine p. 3) du 21 janvier 1959, (SPÉCIAL À NOTRE JOURNAL) Les apaches attaquent et dévalisent les messagers des magasins du Plateau. Depuis quelques semaines les apaches concentrent leurs activités sur le Plateau Mont-Royal et poussent la lâcheté jusqu’à s’attaquer à des adolescents de 12 à 14 ans qui travaillent comme messagers dans nos établissements commerciaux, pharmacies ou Pour 10$, ces gars-là peuvent se sentir la gâchette nerveuse au point de de deux semaines, les bandits se sont attaqués aux messagers des épiceries Desmarteaux, rue Mont-Royal, Allard, Le mercredi 1er juillet 1959, p. 3b (Voir d’autres faits divers à la page 18) La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 13 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU FABRE ET MONT-ROYAL SPECTACULAIRE ÉVASION MARIELLE SIGNORI LE 16 OCTOBRE 1969 un fourgon cellulaire — une provenance de la prison de Bordeaux, circule sur la rue Berri en direction du Palais de justice. Il a à son bord 31 prisonniers, dont Richard Blass, un criminel notoire, ainsi que quatre gardiens, dont seul le chauffeur est armé. Près de la rue Sauvé, un détenu sort un revolver, ordonne au chauffeur de s’arrêter au prochain feu rouge et tire un coup de feu en avertissement. Au même moment, une clé circule parmi les détenus et neuf d’entre eux se libèrent de leurs menottes. À l’arrêt c’est la grande sortie : les neuf s’enfuient dans toutes les directions et une des chasses à l’homme les plus mouvementées qu’ait connue la métropole débute. QUATRE HEURES plus tard, Richard Blass et deux autres évadés sont retrouvés dans un logement au 4543, rue Fabre, près de la rue MontRoyal. C’est le logement retrouvent à quatre pattes sur le gazon, les yeux pleins de larmes : non de regrets, mais voisin de celui de la femme de Blass, qui était surveillé depuis quelque temps. Des bombes lacrymogènes sont utilisées, des coups de feu maîtrise les individus qui se LE MINISTRE de la Justice a parlé d’aide de l’intérieur et de l’extérieur pour qu’une telle évasion puisse se produire, car au moins quatre ou cinq des détenus, dont Blass, n’avaient pas à se rendre au Palais de justice ce jour-là !!! Voir Allô-Police, 26 octobre 1969. UN DÉCÈS, SIX BLESSÉS UNE BOMBE DU FLQ SUR LE PLATEAU MARIELLE SIGNORI D Thérèse Morin, à l’emploi de l’usine depuis une quarantaine d’années, meurt sur le coup — elle tenait le colis entre ses mains — et six employés sont blessés autour d’elle. 1960, le mouvement du Front de libération du Québec entreprend des actions en appui à la classe ANS LES ANNÉES À LA SUITE de l’enquête, six personnes, membres du Mouvement de libération populaire, cellule felquiste dirigée par Pierre Vallières et Charles Gagnon, sont arrêtées. Elles reçoivent des peines d’emprisonnement variant selon l’importance de leur implication. travail. Le Plateau MontRoyal n’y échappera pas. LE FLQ est un mouvement politique radical qui prône l’utilisation de la lutte armée et d’émancipation pour le Québec. Entre 1963 et 1970, vols de dynamite, attentats à la bombe, braquage de banque font souvent les manchettes : deux meurtres et au moins trois crimes provoquant des morts violentes dues à des attentats à la bombe ou à des fusillades sont perpétrés. LA MANUFACTURE de chaussures H.B. LaGrenade Ltée, située au 2496, rue Rachel, coin Iberville, est La Presse, 6 mai 1966 en grève depuis plus d’un an en ce jour fatidique du 5 mai 1966. L’avis qu’une bombe éclaterait à cet endroit a bien été reçu mais est demeuré ignoré. Vers midi trente, une explosion survient alors qu’un colis piégé a été livré quelques instants auparavant par un mystérieux messager. page 14 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 LA CRISE du FLQ au Québec est un des événements qui ont éventuellement mené à la création du Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, en 1984. Source : www.archives.radiocanada.ca DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU LA TERREUR DES CRIMINELS DR WILFRID DEROME (photo du haut) et 510, rue Cherrier. (Photos : Marielle Signori) MARIELLE SIGNORI L DOCTEUR WILFRID DEROME, dont la renommée a franchi bien des frontières, a été le premier à se battre pour faire reconnaître l’expertise médico-légale devant les tribunaux. Il demeurait sur le Plateau-Mont-Royal au début des années 1900, tout d’abord au 318, carré Saint-Louis puis au 510, rue Cherrier. Souvent, les paroissiens de l’église Saint-Louis-deFrance l’entendaient chanter E sont si appréciés qu’en 1908, du nouveau laboratoire de pathologie et d’histologie de l’hôpital, et on lui accorde même un congé d’un an pour aller étudier à Paris, spécialiser en médecine légale et en psychiatrie. Il apprend d’Alphonse Bertillon la technique de mesures anthropométriques, qui permet d’établir Portrait DÈS LE DÉBUT de sa carrière, il s’est intéressé à la médecine judiciaire, dont il est rapidement devenu expert : autopsie, balistique, biologie, graphologie et photographie judiciaire n’ont bien vite plus de secrets pour lui. Ses expertises sont reconnues partout au Canada et aux États-Unis. SA PLUS GRANDE réalisation est certainement la création en 1914 du premier laboratoire de recherches médico-légales et judiciaires en Amérique du Nord, dont il devient le directeur et médecin expert. Il est important de souligner ici que le docteur Derome a reçu à deux reprises le célèbre J. Edgar Hoover, alors directeur du Federal Bureau of Investigation (FBI), qui lui aux États-Unis le premier laboratoire technique à Chicago en 1932, 18 ans après celui de Montréal! NÉ EN 1877 à Napierville, Wilfrid Derome se dirige, dans Wilfrid expert en par après ses études classiques, vers la faculté de médecine de l’Université Laval, rue SaintDenis (qui deviendra en 1920 l’Université de Montréal). Médecin à l’hôpital NotreDame en 1902, il constate très tôt que Montréal possède l’un des taux de mortalité infantile les plus élevés du monde industrialisé. L’est de Montréal est durement touché, car les quartiers ouvriers francophones enregistrent aussi des taux de mortalité deux fois plus élevés que ceux des quartiers anglophones. Il se sent impuissant et croit que la médecine de laboratoire, une meilleure hygiène et la pathologie pourraient jouer un rôle accru : il veut contribuer à la médecine d’une autre façon, il se voit dans un laboratoire. APRÈS il donne sa démission à l’hôpital et trouve du travail à la faculté de médecine en tant que démonstrateur d’histologie, la branche de la biologie qui étudie les tissus des êtres vivants à l’aide du microscope. Ses services des délinquants et reconnaître ainsi les récidivistes. Il remporte brillamment le diplôme de médecin légiste et revient au pays, où il reprend son travail à l’hôpital. CEPENDANT, après avoir vu et travaillé dans les laboratoires de Paris, il constate qu’ici les locaux sont très rudimentaires : il s’engage alors dans un projet de réforme du système judiciaire qui aboutit à la création du premier laboratoire en 1914, qui est situé alors au dernier étage de la morgue de Montréal, au 179, rue Craig (Saint-Antoine). Le docteur Derome s’entoure d’une équipe d’experts, entre autres, Franchère Pépin, pharmacien-chimiste spécialiste en toxicologie, qui deviendra expert en poisons et en explosifs, ainsi qu’un d’immortaliser les scènes de crime pour permettre aux enquêteurs de réaliser (Suite à la page 19) La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 15 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU ROCH BEAUDOIN NOUVELLE ENQUETE DANS LE JOURNAL LA PATRIE EN DATE DU 16 FÉVRIER 1910, ON PEUT LIRE UN ENTREFILET CONCERNANT UN MEMBRE DE LA POLICE : TOUT LE MONDE prédit à l’hôtel de ville que la suspension du constable Pelletier, en rapport avec les scandales de l’élection municipale dans le quartier Saint-Jean-Baptiste, sera le prélude d’une enquête générale sur le département de police. Pelletier, qui fut chargé d’opérer l’arrestation de Geo. Vandelac dans une maison de débauche, le 19 octobre 1908, est accusé d’avoir conduit des femmes aux polls pour les faire voter en faveur sont entre les mains du maire, produits par l’exdétective Guérin et M. Geo. Vandelac lui-même. LE CHEF CAMPEAU dit qu’il ne connaît rien de ces plaintes au sujet de la conduite des constables le jour de l’élection ou durant la campagne municipale. Il déclare qu’il n’a pas peur d’une enquête, et qu’il n’est pas alarmé des rumeurs qui circulent sur son propre compte. Le constable Pelletier qui est inculpé dans la nouvelle affaire, est attaché au poste No. 14, Parc Lafontaine. Il est actuellement malade et sous les soins du Dr Picotte. Note : On trouve un Georges Vandelac marié à Saint-Jean-Baptiste en 1906 et qui se dit entrepreneur. Est-ce le même? On constate que ce Vandelac a ses entrées auprès du maire et qu’il n’a pas aimé se faire arrêter! Et de plus, que le chef ne sait rien! Rien de nouveau sous le ciel de Montréal. — Huguette Loubert (suite de la page 7) baïonnette plus souvent qu’à leur tour. Ce n’est que grâce à la présence d’esprit constables que la bagarre est contenue et que 25 militaires sont amenés au poste central. LES DANGERS du métier sont bien présents comme le prouve le grave incident qu’il a vécu 18 ans avant sa retraite : il fait sa ronde sur la rue Saint-Laurent lorsqu’il entend un cri dans la nuit. Accourant pour porter secours à la désespérée, il est brutalement assailli par un apache qui le frappe à bois. Aveuglé par le sang, il recule mais son assaillant se jette sur lui et lui assène 45 coups de couteau. Il réussit à se protéger d’un coup fatal et peut voir son assaillant prendre la fuite en le croyant mort. Baignant dans son sang, il est recueilli par un charretier qui passe par là. Il a cependant la force de donner les renseignements qui mènent à l’arrestation peu après de Jim McLawrence et de sa compagne, qui écoperont respectivement de cinq et deux ans de pénitencier. IL RESTE plus de trois mois au lit entre la vie et la mort. Une fois rétabli, il retourne au travail, où il exerce la fonction de tourne-clefs. Au moment de sa retraite, le constable Beaudoin est le plus ancien de la force policière, avec ses 48 ans de service et une carrière modeste mais utile. Il est cité comme un modèle de dévouement pour tous. TRAFIC DE BÉBÉS (suite de la page 12) des endroits publics comme des restaurants, alors que page 16 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 leur état bien souvent n’est même pas encore visible. Les informations les concernant sont vendues par des personnes oeuvrant pour les services sociaux, et des médecins à qui elles font appel pour recevoir de l’assistance. On leur offre de payer leur accouchement en toute discrétion dans des maisons ou de petites cliniques privées, et de s’occuper de leur bébé pour le donner en adoption. Elles ne reçoivent personnellement qu’un montant variant de 30 $ à 50 $, et parfois rien. L’ANNÉE SUIVANTE, le Québec découvre que de vendre un bébé ne constitue pas un crime aux yeux de la loi, quand Buller est condamné document à 2000 $ d’amende et une journée de prison, tandis que Glazer écopera d’un peu moins de six mois de prison. La complexité des lois des différents états américains ainsi que les lacunes des lois provinciales et fédérales font qu’il est pratiquement impossible de faire des poursuites. PLUS DE 100 000 enfants de la province ont cependant été légalement adoptés pendant des décennies tant aux ÉtatsUnis qu’à travers le monde. Une enquête d’Alain Gravel sur les ondes de RadioCanada en janvier 2003 a montré toute l’ampleur du phénomène. Sources : Les journaux La Presse, Le Devoir et La Patrie du 12 février 1954 au 14 mai 1955, ainsi que Karen Balcom, The Adoption and Baby-Selling Between the United States and Canada, 1930-1972, University of Toronto Press, 2011. DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU 5030, RUE SAINT-DENIS LA COUR DES JEUNES DÉLINQUANTS rencontrent dans un bureau, et non dans une salle de cour comme présentement, et toujours devant le même juge. Il n’était pas rare de rencontrer un adolescent qui en parlait comme étant déménage à l’endroit actuel sur la rue Saint-Denis à l’intersection Bellechasse. EN 1977 au Québec, est adoptée la Loi sur la protection de la jeunesse. de théâtre, a déjà hébergé la Cour des jeunes délinquants. MARIELLE SIGNORI E 1908, une loi fédérale est adoptée visant à faire du traitement des délinquants accusés davantage un exercice d’aide sociale qu’un processus judiciaire. La Loi sur les jeunes délinquants était fondée sur la doctrine de parens patriae, selon laquelle l’état pouvait intervenir N les situations où une famille ne pouvait pourvoir aux besoins de ses enfants. Le système judiciaire pour les jeunes était désormais régi par le principe obligatoire du meilleur intérêt de l’enfant; par conséquent, le droit à l’application régulière de la loi était minimisé en faveur d’un processus informel et de la promotion du bien-être des enfants. ON AVAIT depuis longtemps considéré la situation particulière des jeunes, et cette loi n’était pas la première à conférer un statut particulier aux mineurs accusés ou déclarés coupables d’infractions : dès 1857, une loi du parlement du CanadaUni posait un premier jalon dans cette direction (Acte pour accélérer le procès et la punition des jeunes délinquants, Statuts du Canada, 1857, chapitre 29). LA PREMIÈRE cour pour enfants au Québec est instituée en 1910. Devenue Cour juvénile en 1932 et Cour du bienêtre social en 1950, pour entendre et juger les causes de nature pénale et criminelle impliquant des personnes mineures (entre 12 ans et 18 ans), elle avait une approche de protection davantage que de répression. Cette dernière cour est remplacée en 1977 par la Chambre de la jeunesse (Cour du Québec, toujours en vigueur à ce jour). DÈS LE DÉBUT de l’application de la loi de 1908, les jeunes délinquants devaient se présenter devant un juge au vieux Palais de justice situé au 155, Notre-Dame : par conséquent, ils partageaient les mêmes locaux et lieux de détention que les criminels aguerris. De là la nécessité de la Cour juvénile : Jean-Omer Marchand en sera l’architecte (voir le texte plus bas par Gabriel Deschambault). VERS 1929-1930, la cour s’installe dans d’un régime particulier. Le jeune ainsi que ses parents sont suivis par un juge en présence d’un travailleur social et d’un procureur de la poursuite. Tous se la situation de compromission et d’en prévenir la répétition par des mesures de contrôle, de surveillance et d’aide. C’est le signalement qui est l’élément déclencheur. C’est alors la création de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) qui est chargée d’appliquer cette loi. AU FÉDÉRAL en 1984, on remplace la Loi sur les jeunes délinquants par la Loi sur les jeunes contrevenants, destinée à remédier à un grand nombre de lacunes dans le traitement des jeunes délinquants. En particulier, elle réglait la question des droits du contrevenant, maintenait la distinction entre le crime commis par un jeune et celui commis par un adulte et prévoyait une approche très différente et beaucoup plus indulgente envers les jeunes. MALGRÉ les nombreuses critiques dont Loi sur les jeunes contrevenants représentait une nette amélioration par rapport à la Loi sur les jeunes délinquants, puisqu’elle établissait un équilibre entre le droit à l’application régulière de la loi et la protection de la société d’une part, et les besoins des jeunes contrevenants d’autre part. ÉDIFICE DE LA COUR JUVENILE Gabriel Deschambault on pourrait le classer au titre des expérimentations que fait Marchand à cette époque sait si bien accrocher la lumière. C’est d’ailleurs le travail de maçonnerie très soigné qui démarque ce bâtiment. Les coins arrondis du corps principal, les médaillons à motifs du rez-de-chaussée et les hauts pilastres qui séparent les baies de fenêtres lui donnent un caractère imposant. L’entrée est marquée par une avancée largement vitrée et plus basse, qui permet d’articuler la façade et d’offrir un ensemble très harmonieux. Sources : www.justice.gc.ca, www.erudit.org, www.memoireduquebec.com. Photo : www.calypso.bib.umontreal.ca. Remerciements à Me Laurent-Claude Laliberté. La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 17 DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU DES FAITS DIVERS EN « CRIME » ! (suite de la page 13) La police fait enquête (très et de la sournoiserie de ces attaques), et nous espérons que le châtiment servira de leçon avant qu’il ne soit trop tard, avec des dommages LE LIEUTENANT... DE MARBRE (Semaine du 11 février 1959, p. 3) (DIRECTEMENT DE LA RUE MONT-ROYAL) - Se servant de la force du Règlement No 2129 (article 9), le lieutenant Lucien Quintal, qui a charge de la moralité juvénile, a défendu au bijoutier Simon Aird, propriétaire de la bijouterie du même nom, 1233 est, rue Mont-Royal, d’exposer dans sa vitrine! On peut voir Simpson’s dans l’ouest ma chère. Mais pour ce faire, il faut s’éloigner passablement du Plateau Mont-Royal, et vraiment, ça ne fait pas notre affaire. Ni celle de M. Simon Aird... Notre ami bijoutier a probablement commis l’erreur de ne pas juger à propos de faire approuver de la police, et le lieutenant Quintal, qui a toujours l’œil ouvert (quelque soit l’heure du jour ou de la nuit), n’a pas mis de temps à bondir dans la vitrine. De sorte que M. Aird s’est résigné à retourner toute sa marchandise aux importateurs. Ces importateurs ont été légèrement surpris. ‘Nous depuis de nombreuses années à Montréal et dans toute la province, et nous n’avons jamais rencontré d’opposition... Nous pensons donc et nous savons qu’il n’existe aucune loi qui défende la vente de ces Pour ce qui est du lieutenant Quintal, que nous connaissons pour un gentilhomme droit, sincère et de bonne foi dans l’accomplissement de son devoir, nous sommes convaincus... que son enthousiasme ne connaîtra plus de limites. Il est probable aussi qu’il voudra s’abonner au Guide Mont-Royal. LES VOLS, DES SUSHI (Semaine du 18 février 1959, p. 3) (SUR LES LIEUX MÊMES DU CRIME) - Les voleurs travaillent ‘comme des Japonais’ pour percer le coffre-fort et s’enfuir avec un butin de $2,500. Dans la nuit de samedi à dimanche ou de dimanche à lundi matin, des bandits ont ‘percé’ le coffre-fort de la est, rue Mont-Royal. Ils ont ‘travaillé’ en paix et l’on estime le montant du vol à quelque $2,500 en argent et en valeurs, dont cinq appareils ‘stéréophoniques’, des timbres d’assuranceréservoir de Mme Pagé, qui est en charge du bureau! Ils auraient mis au moins cinq heures avant de réussir à percer le coffre-fort. Ils utilisaient une mèche ‘drill’ de très faible diamètre, ‘un vrai travail de Japonais’. Depuis quelques temps le Plateau Mont-Royal est devenu une véritable ‘mine d’or’ pour les bandits et ne serait-il pas opportun de suggérer que la police exerce une plus étroite surveillance dans notre district L’ADO ET LA BOÎTE D’ALARME (Semaine du 29 avril 1959) : Un jeune chauffard de 17 ans, qui semblait être sous été appréhendé par la police, aux petites heures samedi matin alors qu’il s’enfuyait après avoir frappé quatre autos qui étaient stationnées le long du trottoir rue MontRoyal, en plus d’avoir sectionné en deux un poteau d’une boîte de système d’alarme des incendies de la cité avec un camion qu’il aurait apparemment volé. L’adolescent n’a pas arrêté après ces multiples collisions. À quelques deux cents pieds au sud de la rue Mont-Royal (rue Laval), il laissait là le camion endommagé et prenait la fuite à pied. Il fut cependant rejoint par deux citoyens qui s’étaient rendus compte de la conduite dangereuse. Quelques instants plus tard, les constables d’une autopatrouille cueillaient le jeune chauffard. HÉROÏSME DANGEREUX (Semaine du 18 février 1959, p. 9) (RUE PAPINEAU, spécial au ‘Guide’) - Il risque sa vie pour s’emparer d’un voleur! Le jeune homme d’affaires Irving Bernstein, copropriétaire (avec son père) du ‘Papineau Soda Bar & Delicatessen’, a fait preuve d’un remarquable courage, samedi soir, alors qu’il a poursuivi et capturé, seul, un bandit qui venait de dévaliser la caisse ($133) de la ‘Pâtisserie Éclair’, 4512, rue Papineau. page 18 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 D’ordinaire, Irving ne revient pas à son restaurant, le samedi soir, mais, ‘chance de la Providence’, il y revint, samedi dernier, et le voleur se demande encore pourquoi, au juste. Ce fut une permission du Bon Dieu qu’il fût revenu ce soir-là. Irving sent que quelque chose de louche se passe, il entre dans la pâtisserie et Mme Hamel lui annonce à grands renforts de tremblements : ‘Il... vient de nous voler... il est... parti par là!’ Notre ami ne perd pas de temps. Il s’élance au dehors, tourne sur Mont-Royal, vers l’ouest, rejoint l’apache, lui saute au collet, et le ramène comme un beigne à la pâtisserie... et l’a collé comme un moka, au plancher. ‘Maintenant, dit-il au bandit plus que moins feuilleté, assieds-toi tranquille, et nous allons attendre la police!’ Mlle Hamel se rappellera toujours ce samedi 14 février. SUR NOTRE BELLE RUE... ! (Semaine du 19 août 1959, p. 7) Six postes de radio de Montréal ont fait la propagande du Plateau Mont-Royal, lundi. Et il ne s’agissait pas de travaux de la rue Mont-Royal! Les ondes radiophoniques portaient la nouvelle que le magasin André Benoît, 1301 est, rue Mont-Royal, avait reçu la visite d’un malvenu. Le voleur, muni d’une arme à feu, pénétrait dans le magasin et sommait le propriétaire, M. André Benoît, de lui rendre tout l’argent qu’il avait. La police du poste no 16 déclare que le bandit mena M. Benoît dans la cave à la pointe du revolver pour pouvoir s’enfuir. (Suite à la page 20) DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU DR WILFRID DEROME (suite de la page 15) une reconstitution juste des événements à partir de la position des corps et des objets environnants. LE LABORATOIRE contribue à améliorer les méthodes d’aider les enquêteurs de la police. En 1924 il déménage au 443, rue Saint-Vincent. On fait appel à ses services un peu partout au Canada et plusieurs villes américaines souhaitent les obtenir. L’expertise du laboratoire et du docteur Derome sera mise à contribution dans plusieurs affaires judiciaires qui ont fait grand bruit à l’époque. UN CANCER l’emporte à l’âge de cinquante-quatre ans, le 24 novembre 1931. Dans les heures qui suivent sa mort, la presse écrite lui rend hommage, tant dans les journaux francophones qu’anglophones, et les drapeaux de l’Université de Montréal sont mis en berne. Il est inhumé au cimetière de la Côte-des-Neiges. LE DOCTEUR DEROME reçoit aussi un vibrant hommage de ses collègues américains dans l’American Journal of Police Science, où on insiste sur l’importance de dont son Précis de médecine légale publié en 1920 ainsi que le premier traité canadien d’expertise balistique publié en 1929. DEPUIS 2001, la Sûreté du Québec, rue Parthenais à Montréal, qui loge le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, porte en COMMENT LES POLICIERS ARRONDISSAIENT LEUR FIN DE MOIS VOL AU DÉPANNEUR, RUE GAUTHIER! (Illustration du livre Marielle Signori D ANS LES ANNÉES CINQUANTE, la famille de Jacques Duchesneau, ancien chef de police de Montréal, demeurait sur le Plateau Mont-Royal. Elle a habité plusieurs logements autour du parc La Fontaine et déménageait souvent. Le père, André Duchesneau, travaillait très fort pour faire vivre sa famille de quatre enfants : il avait une « run tôt le matin et, en soirée, il était guichetier aux pistes de course Richelieu et Blue Bonnets, en alternance. Wilfrid-Derome. Source : Wilfrid Derome, expert en homicides par Jacques Côté, Boréal, 2003 EN 1953, étant un jeune père de famille, il apprend qu’un commerce peut lui appartenir sans capital ) d’achat, en prenant en charge les paiements — une chance qu’il ne veut pas laisser passer —, et il se lance dans l’aventure. Ce dépanneur est situé au 2001, rue Gauthier, à l’intersection de la rue Bordeaux. Il voit à approvisionner le magasin, remplissant les rayons tandis que son épouse Huguette est au comptoir et sert des repas légers à l’heure du midi. les livraisons et plus tard, tâches. TOUT ALLAIT BIEN jusqu’au jour où le commerce est dévalisé en pleine nuit par des voleurs qui s’emparent de la totalité des cigarettes d’une valeur de 500 $, une fortune à l’époque. Deuxième malheur : le père ne détenait aucune assurance. Le vol est signalé aux policiers qui retrouvent les voleurs et la marchandise. Et voici qu’un troisième malheur se dessine : les policiers exigeaient le versement retour des cigarettes. Dans l’impossibilité de racheter ses cigarettes, scandalisé de s’être fait voler deux fois, par des voyous puis par des policiers, André Duchesneau ne s’en remettra pas. Alors que la famille croyait se sortir de la misère en acquérant le dépanneur, elle se retrouve plus misérable qu’avant et des années de misère suivront. Source : Jacques Duchesneau sur le qui-vive. L’audace dans l’action par Jacqueline Cardinal et Laurent Lapierre, Les Éditions Logiques, Outremont, 2006 La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 19 EXPOSITION SUR LE PLATEAU-MONT-ROYAL RECHERCHÉ : OBJETS SOUVENIRS D LA FOULÉE des expositions temporaires réalisées sur les grandes thématiques montréalaises, Pointe-à- Callière prépare une exposition sur le Plateau-Mont-Royal, véritable quartier emblématique de Montréal, et souhaite emprunter des objets que le public a précieusement conservés. Avez-vous des objets ou des œuvres Marche à suivre divers aspects de la vie quotidienne ANS 1. Avoir un ou des objets ou des œuvres en lien avec l’histoire du Plateau-Mont-Royal (avant 1980), à l’exception des témoignages écrits et des albums de photos de famille; 2. Accepter que vos objets soient présentés dans l’exposition; 3. Être disposé à les prêter pour la durée suivante : de septembre 4. Écrire un court message décrivant votre ou vos objets et ses particularités et joindre une photo à l’adresse courriel suivante : 5. Si vous n’avez pas accès à un ordinateur, contacter la réception de Pointe-à-Callière au 514 8729150, du lundi au vendredi, entre 9 h et 17 h. partager durant cette exposition? COMME PAR EXEMPLE : des éléments architecturaux, des objets industriels (outils des carrières ou des tanneries), des enseignes de commerce, des objets religieux témoignant de la vie paroissiale ou des activités de l’École Le Plateau, des objets ou des œuvres liés à des artistes ou des personnalités connus du quartier, des éléments de FAITS DIVERS EN « CRIME » ! (suite de la page 18) Le bandit, un homme d’une quarantaine d’années, s’est sauvé avec $125.00 en argent et un chèque de $50.00. La sûreté municipale poursuit l’enquête. M. extraordinaire. Une vache, dit-il, toute blanche, court comme une folle sur la Papineau, et se dirige vers la rue Saint- sous les yeux les photos de criminels que que nous annoncerons sa capture dans notre prochain numéro mais d’ici là, restons tous sur nos gardes... VACHE … AU LARGE (Semaine du 29 octobre 1959) Un piéton qui marchait sur la rue MontRoyal, lundi avant-midi, vers onze heures, nous téléphonait aussitôt pour nous dire qu’il était témoin d’une scène C’EST LA FÊTE À MICHON (Semaine du 20 décembre 1959, p. 12) Le Plateau Mont-Royal, qui est en pleine période des fêtes, a été le siège d’un crime la semaine dernière. Des voyous ont défoncé la vitrine de la pharmacie Michon, située au 1361 est, rue MontRoyal, pour s’emparer de trois caméras, évaluées à plus de deux cents dollars. L’APPEL au public se termine le lundi 13 mai 2013. Une sélection des objets retenus sera effectuée par Pointe-à-Callière et les détenteurs seront avisés. Une invitation à la pré-ouverture et un laissez-passer pour deux personnes seront remis à chaque prêteur dont le ou les objets ou œuvres auront été retenus. À noter que Pointe-à-Callière se réserve le droit de refuser toute offre de prêt d’objets même si celle-ci rencontre les critères de sélection. Source : Direction des expositions et des technologies, Pointe-à-Callière Le vol à la pharmacie Michon entache l’atmosphère de gaieté qui règne dans le quartier depuis la réouverture de la rue Mont-Royal. La nouvelle rue qui accueille des gens de tous les quartiers de la métropole, ne peut pas remarquer ceux qui y viennent dans un dessin malhonnête et l’on ne doit pas se surprendre que la foule contiennent aussi des malvenus. Toutefois, une surveillance plus soutenue de la police, tout le temps que durera la promotion des nigauds qui ne savent rien d’autre que de tout détériorer sur leur passage. Les dommages matériels à la Pharmacie Michon s’élèvent à près de $500.00. Les archives du Guide Mont-Royal sont disponibles pour consultation au Centre de documentation de la Société d’histoire. page 20 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 CONFÉRENCE À LA SHGP DÉCOUVERTE D’UNE INSOUMISE E DU XIX SIÈCLE elle a accueilli de nombreuses artistes et personnalités pendant plusieurs années. Amie de longue date d’Émilie Hudon, la mère d’Émile Nelligan, elle est devenue, à sa demande, la protectrice du Huguette Loubert L 6 MARS DERNIER, la Société a eu le grand plaisir d’accueillir Sergine Desjardins, qui nous a fait découvrir Robertine Barry, journaliste à Montréal de 1891 à 1910. L’histoire de cette femme audacieuse, qui, tout au long de sa vie, a combattu dans ses écrits les préjugés envers les femmes et les démunis, a étonné l’audience d’une trentaine de personnes qui, sauf exception, ne la connaissaient pas. E Leur séparation inexpliquée a fait l’objet de plusieurs poèmes de Nelligan, admirablement dits et chantés plus tard par Monique Leyrac et Renée Claude. TOUS NOS REMERCIEMENTS à notre conférencière. Prochaines conférences : Voir la page 2 du présent bulletin. Voir Sergine Desjardins, Robertine Barry, tome 1, La femme nouvelle, et tome 2, On l’appelait Monsieur, Éditions Trois-Pistoles, 2011. SERGINE DESJARDINS, qui connaît bien l’héroïne du jour pour avoir écrit une biographie très documentée en deux tomes sur elle, nous l’a racontée avec vivacité et humour. Et de plus, elle ne s’est pas laissée démonter par un problème technique qui l’a empêchée de projeter les photos qui devaient accompagner ses propos. ROBERTINE BARRY est née en 1863, dans le Bas-du-Fleuve, d’une famille bourgeoise où la lecture et la musique sont très valorisées. Jeune, elle n’hésite pas à sortir des sentiers battus. Son besoin d’écrire se fait de plus en plus pressant et, en 1891, elle est engagée comme journaliste au journal La Patrie à Montréal. Elle prend le pseudonyme de Françoise, dont elle signera ses articles et qui servira aussi à baptiser Le Journal de Françoise, qu’elle fondera en 1902. À La Patrie, elle va sur les s’est enrichie, au cours du dernier mois, de deux fonds Robertine Barry signe ce portrait d’elle de son nom de plume de « Françoise ». d’abord du fonds lieux de reportages, écrit et corrige les copies, tout comme ses compagnons, qui admirent sa vivacité d’esprit, son intelligence et son humour. JOURNALISTE d’avant-garde, elle a revendiqué sur tous les aspects de la vie d’alors, et n’a pas hésité à s’attaquer à Henri Bourassa, misogyne notoire, et à l’église montréalaise. Elle a ainsi ouvert la voie à d’autres journalistes venues une décennie plus tard, comme Éva Circé-Côté, Joséphine MarchandDandurand et Marie Gérin-Lajoie. MAIS CE QUI l’a vraiment démarquée, c’est son écriture drôle, imagée et acérée, chercheuse actuelle, Sophie Doucet, n’a pas hésité à la comparer à celle de Pierre Foglia, ce qui n’est pas peu dire! Huguette Loubert (gauche) avec l’auteure et conférencière Sergine Desjardins (Photo : K. Cohalan) SA REMARQUABLE culture et sa grande curiosité l’ont amenée à voyager, souvent seule, et à entretenir des relations épistolaires dans plusieurs pays. Elle a tenu salon chez elle, rue Saint-Denis, où La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 21 GUIBORD OU GILFORD? LE PLAN BOYER RETROUVÉ Justin Bur Membre de la SHGP D ANS LE BULLETIN du printemps 2012, j’ai rapporté l’histoire qui circule depuis 1937 selon laquelle la rue Gilford devait à l’origine s’appeler Guibord. Il manquait à cette enquête la pièce maitresse : un plan de lotissement de mars 1876 sur lequel la succession fois, quelque quinze ans avant sa construction. CE PLAN était caché en pleine vue. En le plan avait été déposé au Bureau provincial d’enregistrement le 17 mars 1876, selon un document de Conrad Archambault, archiviste de la Ville de Montréal, écrit en 1937. Ce système d’enregistrement des terrains s’appelle aujourd’hui le Registre foncier du Québec. Tous les documents du registre depuis ses origines ont été numérisés et peuvent être consultés par Internet (voir . LA FAMILLE BOYER possédait le lot 328 du cadastre du village de Côte Saint-Louis. Si on cherche l’un des sous-lots (328-1, par exemple) dans le Registre foncier, on retrouve le plan de lotissement de 1876. Il est signé au coin inférieur droit par l’arpenteur Joseph Rielle (1833–1915), qui a occupé plus tard le poste de maire de Verdun (1904–05). CE DÉTAIL du plan de lotissement du 17 mars 1876, déposé par la famille Boyer au Bureau provincial d’enregistrement, indique clairement une nouvelle rue, à mi-chemin entre les avenues Laurier et Mont-Royal, qui se nommerait « Guibord Street ». Les deux rues perpendiculaires sont Boyer, à gauche, et Amherst, aujourd’hui Christophe-Colomb. LEURS VOISINS vers l’est avaient déposé leurs plans de lotissement auparavant, indiquant la rue en question sans lui donner de nom. Le terrain à l’ouest des Boyer a été loti quelques années plus tard, après le changement de nom pour Gilford. IL ÉTAIT également question dans le document de Conrad Archambault d’un atlas de Blaiklock et Leclair. Le volume de cet atlas pour la paroisse de Montréal (hors Joseph Rielle limites de la ville) est daté de RÉDIGÉ en anglais, le plan 1878. Il a été conçu cependant indique très clairement une nouvelle rue à mi-chemin entre «St pour accompagner la publication du cadastre; celui du village de Côte SaintLouis a été élaboré en 1872. C’est pour Rappelons que l’affaire Guibord venait ça que le plan Boyer ne s’y trouve pas. juste de se terminer par la sépulture sous Peut-être que l’exemplaire consulté par escorte militaire de Joseph Guibord M. Archambault avait été mis à jour pour dans le cimetière Notre-Dame-desNeiges, le 16 novembre 1875. Même cadastre : dans ce cas-ci, une copie du si les Boyer avaient eu l’intention plan Boyer y aurait été insérée. d’honorer quelqu’un d’autre, dans le contexte leur choix allait sûrement être ON SAIT que le nom Gilford apparait sur interprété comme un geste de soutien une planche de l’atlas Hopkins en 1879. On ne sait toujours pas si le nom a été aux partisans de l’Institut Canadien. ou volontairement. Joseph Guibord a montréalaise le 29 octobre 1987 par la dénomination d’une nouvelle rue dans le secteur Saint-Michel. C’EST LA PARTIE orthogonale de la rue Gilford qui devait être appelée Guibord. La partie diagonale à l’ouest de Berri, quant à elle, appartient plutôt à la rue des Carrières, un tracé fondateur de Côte Saint-Louis présent depuis le 18e siècle. C’est seulement le 30 novembre 1935 que son tronçon au sud de la voie ferrée a été divisé en deux et affecté aux rues Berri et Gilford pour le forcer à rentrer dans la grille moderne de rues. Références : Registre foncier du Québec : http://www.mrn.gouv.qc.ca/foncier/registre/ registre-systeme.jsp. Portrait de Joseph Rielle : http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/url/ page/arrond_ver_fr/rep_a_propos/rep_aa_ histoire/his_histroire_maires page 22 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 LE JEUDI 9 MAI 2013 À 14 H ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ANNUELLE La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal TOUS LES MEMBRES de la Société d’histoire et de généalogie du PlateauMont-Royal sont invités à l’assemblée générale annuelle qui aura lieu le jeudi 9 mai 2013 à 14 h, suivie d’une conférence (à déterminer). NOTEZ que seuls les membres en règle de la SHGP auront droit de vote. Chacun peut aussi faire parvenir sa candidature au moins une semaine avant l’assemblée aux bons soins du trésorier à l’adresse suivante : M. Robert Ascah, trésorier, Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal, 4450, rue SaintHubert, local 323, Montréal H2J 2W9 (téléphone : 514 523-9159). Le texte intégral de nos règlements est disponible sur notre site Internet à l’adresse www. histoireplateau.org ou en s’adressant au trésorier. DES POSTES au conseil d’administration sont encore vacants : invitation à tous nos membres à poser leur candidature. Le CA est composé de neuf administrateurs, dont quatre, MarieJosée Hudon, Huguette Loubert, Ange Pasquini et Marielle Signori, ont été élus en mai 2012 pour un mandat de deux ans, soit jusqu’en mai 2014. Alors cinq postes sont à combler cette année pour une période de deux ans (mai 2013 à mai 2015). Ordre du jour de l’assemblée générale annuelle 1 Ouverture de l’assemblée 2 Adoption de l’ordre du jour 3 Adoption du procès-verbal de l’assemblée générale 2012 4 Rapport du président 5 Rapport du trésorier comptes ou renonciation à une telle nomination 7 Élection des administrateurs 7.1 Élection d’un président et d’un secrétaire d’élection LIEU : Centre de services communautaires du Monastère 7.2 Rappel des candidatures reçues dans les délais prescrits ADRESSE : 4449, rue Berri, Montréal (Salle Hilda-Ramacière, 3e étage) 7.3 Détermination de la procédure d’élection AU PLAISIR de vous y rencontrer. RICHARD OUELLET, président de la SHGP 7.4 Élections 8 Période de questions et clôture de l’assemblée générale annuelle Portrait d’André Dédé Fortin par Marie-Josée Hudon L’Assemblée annuelle sera suivie d’une conférence de l’artistepeintre Marie-Josée Hudon, membre du CA de la SHGP, sur les toiles géantes des personnages historiques du Plateau et de Montréal. La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 23 La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal DON TESTAMENTAIRE Une excellente façon d’encourager votre société d’histoire à continuer son travail bénévole est de faire un don testamentaire. Information : 514 524-7201 ou info@histoireplateau.org Devenez membre pour l’année 2013 Devenez membre de la SHGP pour aussi peu que 10 $ par année ( ou membre à vie pour 200 $ ) et recevez notre bulletin gratuitement, en plus d’avoir la chance d’assister à nos activités et conférences. La SHGP étant reconnue organisme de charité, nous émettons des Remplissez le formulaire ci-dessous et faites-le parvenir avec votre cotisation à l’adresse suivante : Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal Centre de services communautaires du Monastère, 4450, rue Saint-Hubert, local 323, Montréal H2J 2W9 Nom : Adresse : Ville : Code postal : Courriel : Téléphone : Date : Adhésion annuelle : Chèque Mandat postal Argent comptant Don à la SHGP ( déductible d’impôt ) : Champs d’intérêt : Centre de documentation Témoignages des aînés Photos anciennes Toponymie Autre : Commentaires ou suggestions : page 24 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 Architecture et patrimoine
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