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COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
L’Université Laurentienne, l’Université de Hearst et
l’Université de Toulouse 1 Capitole présentent :
COLLOQUE
INTERNATIONAL SUR LA
PENSÉE SYSTÉMIQUE
COMPLEXE ET
RELATIONNELLE
LES
7 ET 8 MAI 2015
CENTRE VALE POUR
LA VITALITÉ DES LACS
UNIVERSITÉ LAURENTIENNE
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
Le bureau des affaires francophones
La faculté des arts
SUDBURY | ONTARIO CANADA
2
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
Mots de
BIENVENUE
L’Université Laurentienne est
fière d’être l’hôte de l’évènement
scientifique d’envergure qu’est
le Colloque international sur la
pensée systématique complexe
relationnelle. En son nom, je
souhaite aux conférencières et
conférenciers, participantes et
participants que ce colloque
s’avère un moment-clé de leur
parcours réflexif, dont ils se
souviendront pour longtemps.
Denis Hurtubise, Ph.D.
Vice-recteur associé aux études
et affaires franacophones,
Université Laurentienne
C’est avec un grand plaisir
que l’équipe d’organisation du
colloque Pensée systémique
complexe et relationnelle qui se
tient à Sudbury ces 7 et 8 mai,
vous accueille au bord du lac
Ramsey.
Dans le cadre de ce vaste
campus, le colloque initié par
la revue Nouvelle perspective
en sciences sociales devrait
permettre de nombreuses et
fructueuses rencontres de chercheurs venant de divers horizons
géographiques, disciplinaires et lancés dans des voies de recherche
diverses.
Des débats devraient s’y développer, des disputes au sens
ancien du terme, c’est-à-dire des discussions sereines autour
des positionnements des uns et des autres, pour faire avancer la
recherche de chacun d’entre nous.
De la même façon que la revue NPSS accueille dans ses pages
la diversité des approches épistémologiques, théoriques et
méthodologiques, bien qu’elle en préconise certaines plus que
d’autres, ce colloque devrait être l’occasion d’échanger sur les
désaccords afin que surgissent de ces rencontres contradictoires
des ferments de progression, des éléments de compromis ou de
consensus sur les points pouvant être considérés comme acquis, en
même temps que des écarts, des divergences restant en suspens.
denise truax
Directrice générale,
Prise de parole
La maison d’édition Prise de
parole s’est associée à la
revue Nouvelles perspectives
en sciences sociales dès la
publication du premier numéro
en 2005 ; elle est heureuse de
célébrer le dixième anniversaire
de cette aventure scientifique et
de voir, pour l’occasion, réunis
dans un colloque, des chercheurs
qui sont partie prenante dans
cette aventure. Au nom de tout le
personnel de Prise de parole, je
souhaite à tous les participants
un fructueux colloque, à NPSS,
une autre décennie de croissance.
Nous espérons, pour cela, que chacun se trouve dans une position
de confort intellectuel et affectif lui permettant d’exprimer sans
détour, en toute liberté ses propres convictions pour les faire
connaître, voire pour tenter de les faire partager.
Par son thème, la pensée systémique complexe et relationnelle,
ce colloque devrait enrichir la commune réflexion autour des
positionnements, concepts, méthodes permettant de se donner des
représentations enrichies des systèmes sociétaux débouchant sur
des interventions plus adaptées aux besoins des êtres humains.
Nous souhaitons que ce colloque soit le début d’un processus
récurrent et régulier de mise en commun entre chercheurs de
convictions et de modes opératoires, de réflexions théoriques et
empiriques susceptibles d’irriguer la vie des sciences humaines et
sociales au cours des prochaines années.
Pour le comité d’organisation
Claude Vautier, Rédacteur en chef de NPSS
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
3
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
Intervenants (Communications)
BOUABDALLAH Lahcène
Professeur de psychologie, Directeur de l’URDRH
Études de deux cas abordés selon deux cadres
de référence d’inspiration psychanalytique et
systémique
Jeudi 13 h 45 - 14 h
Travail cognitif, communication et gouvernance
des relations de travail : éléments d’analyse
pour une économie politique des relations
Jeudi 14 h 15 - 14 h 30
DUPLAN Yves Jamont Jr
Chargé d’enseignement Université de la Guyane
Quelle logique pour la complexité ?
Jeudi 15 h 15 - 15 h 30
FEILDEL Benoît
Maître de conférences en aménagement de l’espace et
urbanisme; École Polytechnique de l’Université de Tours,
Département Aménagement et Environnement; chercheur à
l’UMR CITERES CNRS 7324
L’émotion est ce qui nous relie au monde.
Quelques évidences plaidant pour une approche
relationnelle des phénomènes affectifs et des
dynamiques socio spatiales
Vendredi 9 h 15 - 9 h 30
HAMADIA Ali
Maître de conférence, chercheur à l’URDRH (Unité de
recherche en développement des ressources humaines),
Université de Sétif 2 Algérie
DIEUAIDE Patrick
Professeur associé, Université de Sorbonne Nouvelle, Paris 3
4
GARRAUD Philippe
Directeur de recherche au CNRS
Centre de recherche sur l’action publique en Europe
CRAPE – UMR CNRS 6051 Sciences Po Rennes
Un usage heuristique de la notion de “système
d’action complexe” : jeux d’acteurs et dynamique
du système des relations internationales
Jeudi 10 h 30 - 10 h 45
en Europe dans le déclenchement de la Seconde
Guerre mondiale GERVAIS Roger
Professeur adjoint en sociologie
Université Sainte-Anne
L’analyse de données textuelles informatisée :
l’étude de la complexité sociale par le biais de
périodiques canadiens et français
Vendredi 10 h 30 - 10 h 45
GIRARD Mélanie
Professeure Université de Hearst
La cuisine : entre historicité, socialité et
émoraison
Vendredi 10 h 45 - 11 h
HIREP Lionel
Doctorant en Géographie, Université des Antilles,
pôle Martinique
La société vue à travers le prisme de la pensée
complexe : le cas de l’anthroposystème du
Lamentin (Martinique)
Jeudi 15 h - 15 h 15
JALBERT Paul
Doctorant en sociologie, Université Laurentienne,
Sudbury, Ontario
Au sein du foyer : une analyse relationnelle des
interactions entre membres d’une famille
Vendredi 9 h 30 - 9 h 45
LAFLAMME Simon
Professeur de sociologie, Directeur du programme de
doctorat en sciences humaines, Uuniversité Laurentienne,
Sudbury, Ontario
Anthropocentrisme et sciences de l’humain
Vendredi 13 h 45 - 14 h
LAROUZ Brahime
Université Moulay Ismail de Meknès, Maroc.
Quelques effets implicites de la négation
Jeudi 11 h - 11 h 15
MARTIN Marcienne
Université de l’île de la Réunion. Laboratoire ORACLE
La pensée systémique analysée à l’aune de
l’entropie
Jeudi 10 h 45 - 11 h
MARTOUZET Denis
Professeur d’urbanisme et aménagement, Université de
Tours, UMR 7324 CITERES
De la relation de voisinage à l’injonction
urbanistique du vivre-ensemble
Vendredi 13 h 30 - 13 h 45
VAUTIER Claude
Université de Toulouse 1 Capitole, Chercheur Laboratoire
LEREPS
De l’intérêt d’une approche relationnelle dans la
modélisation des systèmes complexes
Vendredi 14 h - 14 h 15
VERDIER Margot
Doctorante contractuelle.SOPHIAPOL –
Université de Nanterre Paris Ouest, France.
Coopération et conflictualité dans les squats
anarchistes
Jeudi 14 h - 14 h 15
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
13 h 45 - 15 h
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, salle 102
15 h - 15 h 15
15 h 15 - 16 h 15
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, salle 102
16 h 15 - 16 h 45
denise truax
Bibliothèque J.N. Desmarais, Benoît Feildel
Salle Brenda-Wallace
Séance 2 A
Pause
Séance 2 B
NPSS et
le vol. 10 n° 2
Fin de la journée
11 h 45 - 13 h 45
Grand salon,
The Fresh Food Company
Repas
(Buffet offert)
Discussion (15 h 45 - 16 h 15)
2 intervenants
- Lionel Hirep (15 h 15 - 15 h 30)
- Yves Duplan (15 h 30 - 15 h 45)
Discussion (14 h 30 - 15 h)
3 intervenants
- Lahcène Bouabdallah et
Ali Hamadia (13 h 45 - 14 h)
- Margot Verdier (14 h - 14 h 15)
- Patrick Dieuaide (14 h 15 - 14 h 30)
Discussion (11 h 15 - 11 h 45)
10 h 30 - 11 h 45
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, salle 102
3 intervenants
- Philippe Garaud (10 h 30 - 10 h 45)
- Marcienne Martin (10 h 45 - 11 h)
- Brahime Larouz (11 h - 11 h 15)
- Claude Vautier
(Rédacteur en chef de NPSS)
10 h 15 - 10 h 30
9 h 50 - 10 h 10
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, salle 102
Conférence
Introductive
Titre de la communication
Modérateur (M) et
Rapporteur (R)
Petite librairie
Soir : Oscar’s Grill, 86 rue Durham
La revue NPSS
Vol. 10, n° 2 : La temporalité en SHS
Penser la complexité du monde pour l’action et la socialité
- « La société vue à travers le prisme de la pensée complexe : le cas de l’anthroposystème du Lamentin (Martinique) »
- « Quelle logique pour la complexité ? »
Petite librairie
Penser la complexité du monde pour l’action et la socialité
- « Études de deux cas abordés selon deux cadres de référence d’inspiration
psychanalytique et systémique »
- « Coopération et conflictualité dans les squats anarchistes »
- « Travail cognitif, communication et gouvernance des relations de travail :
éléments d’analyse pour une économie politique des relations »
Petite librairie
Penser la complexité du monde
- « Un usage heuristique du Système d’Action Complexe »
- « La pensée systémique analysée à l’aune de l’entropie »
- « Quelques effets implicites de la négation »
Petite librairie
Rachid Bagaoui (M)
Benoît Feildel (R)
Denis Martouzet (M)
Rachid Bagaoui (R)
Benoît Feildel (M)
Ali Reguigui (R)
« La revue Nouvelles perspectives en sciences sociales et la sociologie contemporaine. Un programme de
refondation. »
- Denis Hurtubise (vice-recteur aux affaires francophones, Université Laurentienne)
- Pierre Ouellette (Recteur Université de Hearst)
Séance 1
9 h 30 - 9 h
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, salle 102
Ouverture du colloque
Petite librairie (NPSS, ouvrages divers des participants…)
Intervenants
Pause
8 h 45 - 9 h 30
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, Hall d’entrée
Accueil, café
Heure et lieu
Horaire (navette gratuite pour les déplacements) Jeudi 7 mai
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
5
6
9 h - 10 h 15
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, Salle 102
Séance 3 A
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
11 h 30 - 13 h 30
13 h 30 - 14 h 45
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, Salle 102
14 h 45 - 15 h 15
15 h 15 - 15 h 45
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, Salle 102
Repas (Buffet offert)
Séance 4
Pause
Synthèse du colloque
Fin du colloque
10 h 30 - 11 h 30
Centre Vale pour la vitalité
des lacs, Salle 102
Séance 3 B
10 h 15 - 10 h 30
8 h 30 - 9 h 15
Accueil et café
Heure et lieu
Claude Vautier et les rapporteurs
Discussion (14 h 15 - 14 h 45)
3 intervenants
- Denis Martouzet (13 h 30 - 13 h 45)
- Simon Laflamme (13 h 45 - 14 h)
- Claude Vautier (14 h - 14 h 15)
Discussion (11 h - 11 h 30)
- Mélanie Girard (10 h 45 - 11 h)
2 intervenants
- Roger Gervais (10 h 30 - 10 h 45)
Petite Librairie
Discussion (9 h 45 - 10 h 15)
- Paul Jalbert (9 h 30 - 9 h 45)
2 intervenants
- Benoît Feildel (9 h 15 - 9 h 30)
Intervenants
Modérateur (M)
et Rapporteur (R)
Claude Vautier (M)
Simon Laflamme (R)
Départ
Synthèse du colloque
Un dernier mot : l’approche complexe relationnelle et NPSS - Perspectives
Petite librairie
Penser la complexité dans et par la relation
Ali Reguigui (M)
- « De la relation de voisinage à l’injonction urbanistique du vivre-ensemble » Mélanie Girard (R)
- « Anthropocentrisme et sciences de l’humain »
- « De l’intérêt d’une approche relationnelle dans la modélisation des
systèmes complexes »
Petite Librairie
Penser la complexité dans et par la relation
- « L’analyse de données textuelles informatisée : l’étude de la complexité
sociale par le biais de périodiques canadiens et français »
- « La cuisine : entre historicité, socialité et émoraison »
Penser la complexité dans et par la relation
Mélanie Girard (M)
- « L’émotion est ce qui nous relie au monde. Quelques évidences plaidant
Denis Martouzet (R)
pour une approche relationnelle des phénomènes affectifs et des dynamiques socio spatiales »
- « Au sein du foyer : une analyse relationnelle des interactions entre membres
d’une famille »
Petite Librarie
Titre de la communication
Horaire (navette gratuite pour les déplacements) Vendredi 8 mai
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
Résumés des
COMMUNICATIONS
Pr LAHCÈNE BOUABDALLA
Professeur d’enseignement supérieur
ALI HAMAIDIA
Maître assistant « A »
Unité de recherche en développement des ressources humaines (URDRH),
Université de Sétif 2 Algérie
hamaidia@urdrh.com
Études de deux cas abordées selon deux cadres de références (d’inspiration
psychanalytique et approche systémique)
L’exercice psychoclinique, comme l’existence de la psychologie clinique elle-même, demeurent récents en Algérie
et ce constat s’applique également aux différentes prestations assurées par le psychologue clinicien local, à savoir
l’étude de cas et la psychothérapie. En revanche, la tendance actuelle est d’élaborer des thérapies intégratives, suite à la
découverte des facteurs communs aux différentes psychothérapies, la multiplication des méthodes, l’inadéquation des
théories exclusives…
Dans la communication proposée, on va faire état de deux cas étudiés et suivis cliniquement : l’un est un cas de
névrose obsessionnelle et le deuxième de manifestations d’inadaptation. Ces deux cas sont présentés et abordés
tous les deux selon deux cadres de référence différents : le premier cadre est d’inspiration psychanalytique (adopté
réellement dans la prise en charge qui a eu effectivement lieu), et le deuxième cadre est basé sur une approche
systémique.
Dans la pratique de la psychologie clinique, l’approche systémique n’est utilisée que dans un champ très étroit :
la thérapie familiale.
La communication s’attache à montrer empiriquement que l’on pourrait user de l’approche systémique dans d’autres
champs d’application de la psychologie. Elle tend aussi à mettre en évidence le fait que les approches ‘‘subjectives’’
entraînent une réduction flagrante du problème en le dissociant de ses contextes que sont les systèmes familial,
institutionnel, social.
Ce travail se développe autour de la première question posée dans la problématique du colloque : « au-delà des
déclarations de principes sur l’importance du dépassement de la pensée réductrice, comment sont mises en œuvre
empiriquement ces approches ? ».
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
7
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
PATRICK DIEUAIDE
Professeur associé, Université de Sorbonne Nouvelle, Paris 3
Patrick.Dieuaide@univ-paris3.fr
Travail cognitif, communication et gouvernance des relations de travail : éléments
d’analyse pour une économie politique de la relation
L’objet de cette communication est de s’interroger sur les perspectives ouvertes par les propositions du programme
de recherche développées dans le cadre de la revue NPSS autour d’une sociologie de la relation. Mutatis mutandis,
on se propose de réfléchir à quelques propositions qui pourraient aider à cerner les contours de ce que l’on pourrait
dénommer une « Economie Politique de la relation ».
En suivant les représentants de cette école de pensée pour lesquels « la relation est communication » (Vautier, 2008,
p. 86) et la communication « toujours déjà-là, constitutive de l’être social » (op. cit., p. 87), la convergence avec
une approche des mutations du système productif en termes de « knowledge based economy » ou de « capitalisme
cognitif » (Paulré, 2008) est patente.
Un tel rapprochement ne manque pas de souligner l’actualité et l’intérêt pour l’analyse d’assimiler la communication
à une activité langagière de production et d’échange d’informations ou de connaissances, et plus largement encore
de représentations. Cette perspective conduit à porter un regard particulier sur les relations de travail dans les
entreprises, dont la dimension communicationnelle se présente comme une composante essentielle dans la manière
pour les individus de s’impliquer, de s’engager et de se coordonner aux fins d’organiser, réaliser, voire anticiper les
actions à mener.
La présente contribution se propose d’approfondir cette perspective en s’interrogeant sur le sens et l’importance de
la communication dans la production, l’organisation et la gestion de ces « communautés d’action » (Zarifian, 2008).
Pour avancer sur ce point, deux pistes de réflexion seront explorées.
Nous reprendrons et approfondirons la notion de « travail cognitif » forgée il y a quelques temps déjà (Dieuaide,
2011, 2005) en insistant plus particulièrement sur l’importance de la communication pour « orienter » la subjectivité
des travailleurs en vue d’assurer le partage ou la mise en commun des ressources dont ils disposent personnellement
ou auxquelles ils ont accès. Il s’agira plus exactement d’expliciter la diversité des apprentissages par lesquelles l’activité
de communication rend possible le rassemblement d’individus autour d’une vision partagée de l’organisation
des moyens et des fins de l’activité de travail de chacun d’eux. Cette réflexion nous conduira à caractériser la
communication comme une activité productive de règles d’usage au fondement d’un agir collectif (Zarifian, 2010).
Nous examinerons en second lieu la question plus générale de la place et du rôle des règles dans la gouvernance de cet
agir collectif au sein des entreprises. Les débats autour des dimensions implicite/explicite et des écarts entre la règle
et son interprétation seront rappelés (Cometti, 2011). Nous insisterons surtout sur l’opposition entre la dimension
publique des règles d’usage développées au cœur des relations de travail et la dimension privée du contrôle et de
son application par le management. Nous préciserons le sens et l’importance de cette opposition du point de vue
des problèmes pratiques et politiques que soulève l’imposition d’une norme de validation des règles d’usage sur
les comportements d’interprétation au cœur de l’action collective (Reynaud, 1997). Cette réflexion nous conduira
à préciser la place, le rôle et les limites de la communication comme instrument de rationalisation cognitive, tant
au niveau de l’organisation de l’activité de travail (ou de son efficience pour l’entreprise) qu’au niveau politique des
relations entre démocratie, travail et prise de décision (Trentin, 2012).
8
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
YVES JAMONT Jr DUPLAN
Chargé d’enseignement, Université de la Guyane
duplanyves@gmail.com
Quelle logique pour la complexité ?
Une connaissance d’un objet perçu complexe produite et modelée dans et par la logique standard est-elle soutenable,
scientifiquement pertinente et valide ? Ne devrait-on pas recourir à d’autres principes logiques appropriés pour
comprendre et expliquer les phénomènes perçus complexes ?
Toute l’architecture de la logique standard est supportée par l’axiomatique identitaire dite aristotélicienne constituée
des principes d’identité, de non-contradiction et du tiers exclus. De par ces principes, la logique standard donne lieu
à un cadre de pensée dans lequel tout concept se différencie et se distingue, strictement et discrètement, de tout autre
concept. Il appert qu’elle ne permet pas de concevoir les phénomènes perçus complexes. En effet, la logique standard
exclut tout ce qui est opposé (contraire, contradictoire), chaotique, ambigu, imprécis, indécis, paradoxal. Que ce soit
par l’analyse propositionnelle prédicative (Aristote) ou par l’analyse fonctionnelle (Russell et Frege), les relations
formant systèmes ne peuvent être appréhendées sans remettre en question l’axiomatique identitaire. Le processus
et l’évolution caractéristique de l’organisation impliquant la transformation, la durée et la continuité sont en butte à
l’axiomatique de la logique standard.
Il est tentant de se rabattre sur la logique floue pour dépasser les limites et les apories de la logique standard. Ce serait
nier que celle-là est conforme à l’axiomatique identitaire. D’ailleurs c’est une extension de la logique standard.
La logique standard accouche une pensée analytique qui disjoint et mutile, réduit et simplifie le réel pour en faire
« une idée logique », une idéo-logie. Une logique alternative est nécessaire pour camper et asseoir la pensée de
la complexité, la pensée « chaosmique », la pensée systémique et relationnelle. Telle est la logique que je propose
d’appeler la logique de la complexité. Elle intègre l’analytique dont elle reconnaît la pertinence toute relative et se base
sur la dialectique pour appréhender les oppositions et les ambiguïtés. Il ne s’agit pas d’une pseudo-dialectique, c’est-àdire, comme la dialectique hégélienne de réconciliation synthétique et la dialectique bachelardienne de juxtaposition
complémentaire des termes opposés, une dialectique qui renoue avec le principe de non-contradiction, mais plutôt
d’une dialectique qui admet la contradiction comme la dialectique de la continuité intuitive (Georgescu-Roegen), de
la récursivité (Morin), de l’actualisation/virtualisation (Lupasco).
La logique de la complexité repose sur trois principes axiomatiques, à la fois distincts et complémentaires :
• le principe d’ipséité : A est soi-même),
• le principe de différentialité : A n’est pas Ã),
• le principe de relationnalité : B est de A et de Ã).
Le principe d’ipséité valide toute connaissance d’un phénomène perçu, conçu et compris récursif, auto-organisé
ou demeurant inchangé dans le temps, dans l’espace ou par la forme. Il fait pendant au principe de différentialité
selon lequel un phénomène représenté par A est perceptible, et différenciable (ou identifiable par différenciation),
dans un contexte donné, dans le temps, dans l’espace ou par la forme, de tout autre phénomène désigné par Ã. Cette
différentiation n’est pas une distinction discrète, distinction d’ailleurs qui ne peut être que relative. Car, comme
l’indique le principe de relationnalité, un phénomène relationne, prolonge, complète, englobe, interagit avec d’autres
phénomènes dans un contexte donné, dans le temps, dans l’espace ou par la forme. Cela dit, tout phénomène B lie et
conjoint d’autres phénomènes A et Ã.
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
9
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
BENOÎT FEILDEL
Maître de conférences, École Polytechnique de l’Université de Tours
benoit.feildel@univ-tours.fr
L’émotion est ce qui nous relie au monde. Quelques évidences plaidant pour une
approche relationnelle des phénomènes affectifs et des dynamiques socio-spatiales
À travers cette communication, nous proposons de mettre en débat les résultats obtenus dans le cadre d’une
recherche portant sur la question du rapport affectif des individus et des groupes sociaux à leurs espaces de vie
(Feildel, 2010) et de partager quelques évidences plaidant pour une approche relationnelle des phénomènes affectifs
et des dynamiques socio-spatiales.
Cherchant à comprendre les mécanismes à l’origine des vécus affectifs, des émotions, des sentiments, d’individus
plongés dans différents environnements sociaux et spatiaux, nous avons conçu et mis en œuvre une enquête auprès
de vingt habitants de l’agglomération de Tours (France). Couplant un récit de vie spatialisé, permettant de retracer
l’ensemble des lieux remémorés par les individus à l’échelle biographique, avec une épreuve d’herméneutique
cartographique (Feildel, 2012), visant la qualification des espaces de vie, l’enquête menée a permis de révéler
l’importance de la dimension affective comme facteur explicatif de l’organisation spatiale des sociétés. Ainsi, nous
avons pu mettre en évidence comment les individus et les groupes sociaux, par le truchement de l’espace, gèrent la
distance aux autres et à eux-mêmes, comment ils s’inscrivent et ils prennent place dans un réseau formé de lieux et
de liens investis affectivement. Cependant, l’apport de cette recherche n’aura pas seulement été de contribuer à la
critique du réductionnisme rationaliste (Laflamme, 1995) et d’illustrer le poids des émotions dans les attitudes et les
comportements des acteurs sociaux. La compréhension que nous avons tracée des phénomènes affectifs a également
permis de révéler le caractère dynamique et complexe de l’évaluation des espaces, plaidant pour une approche
attentive aux qualités des relations et leurs évolutions dans le temps.
La nécessité d’une approche relationnelle s’est dès lors imposée à nous. Ce qui compte avant tout – et ce sur quoi
devraient se fonder les politiques publiques de transformation des espaces habités – c’est la nature des relations que
les individus entretiennent, qu’ils ont entretenues ou qu’ils désirent entretenir, à leurs espaces de vie. Cette relation
n’est pas seulement spatiale. Même si elle s’exprime en un lieu déterminé, elle dépend plus largement de l’ensemble
des liens, a fortiori sociaux, qu’un individu a déployé dans les différents environnements investis. Pour cette même
raison, la relation est avant tout temporelle. Même si elle s’exprime à un moment donné, elle dépend de l’actualisation
circonstancielle de l’ensemble des relations passées, présentes et à venir aux espaces de vie. Bien plus que les
caractéristiques du lieu en soi, c’est tout le parcours de vie qui semble engagé dans la construction de la relation
de l’individu à son espace de vie. Ce qui apparaît structurant c’est la relation, autrement dit, cet effet de lien qui est
capable d’expliquer à la fois la permanence de certains traits de la situation, la stabilité de certaines pratiques sociales
et spatiales, l’émergence de nouvelles ou l’abandon d’anciennes.
Enfin, si les résultats obtenus plaident clairement pour une approche relationnelle des dynamiques à la fois sociales
et spatiales – et qu’il conviendrait a minima d’en tirer les conséquences en matière d’actions publiques – il faut
également souligner que l’émotion, la façon dont celle-ci s’exprime, s’avère un outil extrêmement intéressant pour
atteindre et comprendre la relation. Contre la conception séparatiste et purement individualiste véhiculée par un
certain nombre de psychologies populaires et d’autres à visée scientifique, l’émotion s’avère en réalité un matériau
extrêmement riche. Elle nous révèle la nature des liens qui nous unissent aux autres, la façon dont nous sommes
attachés aux choses et aux êtres. Dès lors, si on prenait un peu plus au sérieux son expression, se gardant d’une
conception trop intellectualisée, l’utilité sociale et politique de l’émotion nous serait révélée (Feildel, 2014).
10
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
PHILIPPE GARRAUD
Directeur de recherche au CNRS, Sciences Po Rennes
philippe.garraud@sciencespo-rennes.fr
Un usage heuristique de la notion de « système d’action complexe » : jeux d’acteurs et
dynamique du système des relations internationales en Europe dans le déclenchement de
la Seconde Guerre mondiale
Cette conceptualisation est relativement ancienne* mais, après une brève période d’engouement, elle n’a eu qu’une
postérité très réduite en science politique en France. Elle a été essentiellement connue par l’analyse systémique
(et excessivement fonctionnaliste) de D. Easton**, avant d’être abandonnée dans les années 1980, relations
internationales incluses où pourtant elle a été largement utilisée. Seule la sociologie des organisations l’a construite
et conservée sous une forme particulièrement pertinente (M. Crozier et E. Friedberg, L’acteur et le système. Les
contraintes de l’action collective, Le Seuil, 1977), mais qu’on peut considérer comme sous-mobilisée en France, en dépit
de la tentative du CNRS de développer son usage dans les sciences sociales dans une perspective interdisciplinaire et
qui n’a eu pratiquement aucun impact.
« Un système complexe peut être défini comme un système composé de nombreux éléments différenciés interagissant
entre eux de manière non triviale [...] [qui] se caractérise par l’émergence au niveau global de propriétés nouvelles,
non observables au niveau des éléments constitutifs, et par une dynamique de fonctionnement global difficilement
prédictible à partir de l’observation et de l’analyse des interactions élémentaires. En particulier, un système complexe
typique a un comportement holistique qui rend vain toute tentative d’analyse par une découpe en sous-systèmes plus
simples »***. Et à la condition de débarrasser cette notion de tout fonctionnalisme, on voit mal comment il serait
possible de s’en passer du fait de sa capacité heuristique.
Au-delà des acteurs et de leurs stratégies, existe un système organisé de relations comme construit d’action collective
qui, dans les politiques étudiées, présente la particularité d’être un système de systèmes particulièrement complexe
(des systèmes nationaux participant d’un système international qui ne constitue pas un simple environnement
extérieur). La notion de système apparaît donc centrale et particulièrement heuristique pour intégrer ces différents
jeux d’acteurs, tout particulièrement leurs interactions et interdépendances, et leurs effets à l’échelle nationale comme
internationale.
Une telle perspective ne conduit cependant pas à opposer une vision structurale ou systémique à une approche
plus stratégiste ou événementielle, mais bien à les intégrer étroitement en mettant en évidence les interactions,
les contraintes et les interdépendances qui ont conditionné les différents choix politiques des acteurs, et qui ont
progressivement circonscrit et fermé le champ des possibles. Beaucoup plus que les volontés individuelles des acteurs,
ce sont les propriétés du système qui déterminent sa logique, sa dynamique globale et ses effets. Cette proposition se
veut donc « équilibrée » entre éléments de cadrage théorique et analyse empirique du système particulier de relations
que constituent les relations internationales en Europe durant cette période qui sont très bien documentées sur le
plan historiographique et bibliographique.
Sur le plan empirique du terrain particulier analysé, on se proposera d’étudier successivement :
1 - Les stratégies des différents acteurs nationaux : Allemagne, France, Grande-Bretagne, Pologne, URSS, Belgique
2 - Interactions et interdépendance des jeux d’acteurs et propriétés du système
3 - La dynamique et les effets de système : le chemin de la guerre
* Von Bertalanffy L., Théorie générale des systèmes, Paris, Dunod, 1993 (édition initiale 1968). Biologiste d’origine autrichienne
installé aux États-Unis (1901-1972), il a proposé une théorisation générale non réductionniste et non mécaniciste fondée sur la notion
de système ouvert à évolution non linaire.
** Easton D., Analyse du système politique, Paris, Armand Colin, 1974 (édition initiale 1965). Pour une présentation critique, voir
Lagroye J., Sociologie politique, Paris, Presses de Sciences Po-Dalloz, 2002 (4e édition), p. 213-215.
*** « Programme interdisciplinaire “Systèmes complexes en SHS” : appel à propositions » : www.cnrs.fr/DEP/prg/SystemesComplexesSHS.htlm qui précise que « le champ des applications de la théorie des systèmes complexes est extrêmement vaste [...]. Alors qu’en
physique ces éléments constitutifs sont relativement simples et homogènes, cela n’est plus le cas en biologie où ces éléments peuvent
être des cellules vivantes, voire des êtres vivants (en écologie). A fortiori, dans les sciences humaines et dans les sciences sociales,
ces éléments sont hautement complexes et différenciés, puisqu’il s’agit “d’agents cognitifs”, munis de représentations, de capacités
mémorielles et d’intentions, capables de développer de stratégies individuelles. Plus généralement, la notion de “niveau” est essentielle
en ce domaine, les constituants d’un niveau s’agrégeant pour donner naissance aux constituants d’un niveau supérieur ».
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NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
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COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
ROGER GERVAIS
Professeur-adjoint, Université Sainte-Anne
roger.gervais@usainteanne.ca
Analyse de données textuelles informatisées : l’étude de la complexité sociale par le biais
de périodiques canadiens et français
Les problématiques de la systémique complexe et des études relationnelles nous encouragent à « surmonter la
pensée limitative » (appel à communication de NPSS) et à pousser plus loin notre compréhension de la société et
des individus qui la constituent. S’ajoute à cette réflexion, la nécessité, issue de la mondialisation, de surpasser les
frontières d’espace et de temps dans le but de comprendre les phénomènes d’un point de vue international. Cette
situation impose ainsi des échantillons de plus en plus volumineux. Notre communication propose d’examiner les
grandes problématiques liées à l’analyse de données textuelles informatisées en s’appuyant sur une recherche que nous
avons menée comme étude de cas.
Les approches dites relationnelles (Laflamme, 1987), systémique complexe Morin, 1980, 1977) et conjonctives (Le
Moigne, 1999, p. 178), pour n’en nommer que quelques-unes, peuvent bénéficier d’outils de traitements de données
massives afin de répondre à leurs questions philosophiques de grande envergure.
Anciennement, ces outils comportaient des risques certains. L’analyse factorielle, nous disait Dominique
Maingueneau (1976, p. 36) : n’est qu’une méthode de traitement des données, et nullement de constitution des données : autrement
dit, elle est passible des mêmes critiques que toute entreprise opérant sur les mots à la surface du
discours ; en outre, c’est d’une statistique « hors contexte » qu’il s’agit, avec les inconvénients que cela
implique.
Si cet avertissement est toujours pertinent, les logiciels contemporains les plus performants permettent à la fois des
analyses lexicales et des analyses contextuelles qui réduisent les dangers d’une statistique sans « sens ». Le chercheur
peut donc, tout en étant pilote de sa propre étude, cibler rapidement des tendances à l’intérieur de corpus énormes
qui débordent de chaos. Les logiciels permettent ensuite au chercheur de saisir le sens de ces objets, de ces tendances,
puisque le logiciel, lui, ne perd plus le contenu dans lequel l’information a été initialement organisée.
Dans le cadre de nos recherches, par exemple, le logiciel SPAD a été utilisé non seulement pour produire des
analyses factorielles, mais aussi pour retenir le sens derrière la concordance des mots. Notre nous proposons donc
d’utiliser notre travail en tant qu’analyse de cas ; les conclusions de notre recherche seront moins importantes que
l’étude de l’application du logiciel par rapport aux grandes problématiques liées à l’analyse des données textuelles.
Nous expliquerons la manière dont nous avons analysé 11 020 articles de périodiques parus au Canada et en France
en 2005 afin de mieux comprendre les phénomènes d’homogénéisation et de différenciation. Compte tenu des
arguments présentés par des auteurs comme Émile Durkheim (1991 [1893]), Karl Marx (1983 [1847-1848]), Georg
Simmel (2003 [1995]), Vilfredo Pareto (1968 [1917-1919]), Max Weber*, les structuro-fonctionnalistes (Parsons,
1973 [1966]), les néofonctionnalistes (Alexander et Colomy, 1990), les penseurs de l’École de Francfort (Adorno
et Horkheimer, 1974, Marcuse, 1968), Alain Touraine (1997), Naomi Klein (2001 [2000]), Pierre Bourdieu (1966),
Ulrich Beck (2003 [2002]), les articles ont été sélectionnés à partir de périodiques français et canadiens. Les données
ont été organisées dans des analyses factorielles et en fonction du vocabulaire spécifique, puis elles ont fait l’objet
d’une interprétation, chacune des techniques cherchant à combler les faiblesses de l’autre.
* Le concept de différenciation chez Weber est plutôt présenté par d’autres auteurs. Voir, par exemple, Richard Münch,
« Differentiation, Rationalization, Interpenetration : Emergence of Modern Society », dans Jeffrey C. Alexander et Paul Colomy (dir.),
Differentiation Theory and Social Change, New York, Columbia Press, 1990, p. 441-464.
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NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
MÉLANIE GIRARD
Professeure, Université de Hearst
melanie_girard@uhearst.ca
La cuisine : entre historicité, socialité et émoraison
De nombreux travaux, en sciences sociales, ont mis en valeur les limites des approches qui ont pour fondement le
postulat d’un acteur rationnel. De nombreux travaux ont veillé, conséquemment ou par ailleurs, à développer et à
opérationnaliser des appareils théoriques et analytiques destinés à rendre compte de la nature complexe, c’est-à-dire
rationnelle et non rationnelle ; consciente et non consciente ; intéressée et non intéressée ; intentionnelle et non
intentionnelle ; stratégique et non stratégique ; émotive et non émotive… de l’agir humain. L’approche relationnelle
développée par Simon Laflamme* participe de cette entreprise ; et depuis maintenant une vingtaine d’années,
s’accumulent, grâce à un cercle certes restreint, mais vigoureux, réflexions et travaux empiriques par lesquels se
manifeste la richesse d’analyses qui ont pour pivot analytique la relation plutôt que l’action. Mobilisant les concepts
d’historicité, de socialité et d’émoraison notamment, nombre d’entre eux ont fait état de l’impossibilité de concevoir
un humain qui, en tant que nécessairement communicationnel, soit autre que fondamentalement relationnel.
S’imposent à présent, nous semble-t-il, des travaux d’une nature autre ; des travaux qui ne consistent plus à démontrer
les limites des approches à caractère surrationnalisant ; des travaux qui, de concordance avec ces acquis, permettent
au chercheur d’explorer l’univers du socialement observable à travers le prisme de la relationalité. C’est dans cet esprit
que nous proposons d’appréhender la Cuisine. Distinguant entre sociétés prémodernes, modernes et postmodernes,
c’est par le biais de trois thèmes – la production alimentaire, le rapport à la Table, les représentations alimentaires –
que nous montrerons comment s’articulent socialité, historicité et émoraison.
* Au niveau macrologique, Simon Laflamme développe une théorie relationnelle dans l’ouvrage La société intégrée. De la circulation
des biens, des idées et des personnes (New York, Bern, Paris, Peter Lang, Worcester Polytechnic Institute, Studies in Science, Technology
and Culture, vol. 12, 1992) ; au plan micrologique, c’est dans Communication et émotion. Un essai de microsociologie relationnelle
(Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques Sociales », 1995) qu’il le fait.
LIONEL HIREP
Doctorant, Université des Antilles, pôle Martinique
loulouhirep972@live.fr
La société vue à travers le prisme de la pensée complexe : le cas de l’anthroposystème du
Lamentin (Martinique)
La Martinique appartient à la fois à la zone d’intégration européenne et à la zone d’intégration américaine. Le
Lamentin est l’une de ces communes qui se trouvent dans ce paradoxe zonal. Le Lamentin fait aussi partie de
l’agglomération macrocéphale de la Martinique : l’agglomération de Fort-de-France. À cela s’ajoute le fait que le
Lamentin est la commune la plus grande et la plus riche de l’île grâce à sa situation topographique, son relief quasi de
plaine, qui lui a permis de recevoir de nombreuses activités économiques. À l’instar de Pichod-Viale et Frontier, qui
ont appliqué l’approche systémique à la nature pour aboutir au concept d’écosystème, nous voulons appliquer l’analyse
systémique à cette zone de la Martinique. Nous pourrons ainsi, en appliquant cette fois ci l’approche systémique
aux sociétés, élargir considérablement notre champ de vision. Des applications fragmentées de l’analyse systémique
des sociétés ont déjà été réalisées mais qu’en est-il de la théorisation ? Pourra-t-on comme Pichod-Viale et Frontier
redéfinir et améliorer significativement le concept d’anthroposystème ?
Mon travail de recherche a donc pour objectif la compréhension d’une société : la société lamentinoise. Pour ce faire,
je vais analyser sa structure à travers les quatre composants élémentaires d’une société, c’est-à-dire : le transport ;
l’habitat ; l’information et enfin l’homme (sa santé et son éducation ; son corps et son esprit). Puis, je vais m’attarder
sur son fonctionnement : comment ces quatre composants interagissent-ils entre eux ? Notamment en étudiant
la typologie des flux anthropiques en jeu dans ce système : les flux de capitaux ; de marchandises ; de personnes
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COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
et d’informations. Je n’étudierai pas seulement ces flux internes au système mais je m’intéresserai aussi aux flux
externes. Leur absorption est indispensable au développement de toute société. Ce sont les flux naturels utilisés
par l’homme : flux de l’eau ; de la matière organique (dans l’alimentation et dans la fabrication de médicaments) ;
des matières minérales (dans la construction par exemple) ; de l’air et des énergies naturelles (pétrolière ; solaire ;
éolienne ; marémotrice et hydraulique). Cependant, mon travail ne s’arrête pas là, il n’oublie pas les gestionnaires
(mairie ; C.A.C.E.M. (Communauté d’Agglomération du Centre de la Martinique) ; département ; région ; État
français ; Europe) et les agents d’entretiens (policiers ; gendarmes ; pompiers ; etc.) du système. J’étudierai aussi
l’évolution de la société de par ses modes de résilience face aux perturbations internes et externes, ses mutations
culturelle, structurelle et économique. Pour terminer, j’étudierai à la fois les relations dangereuses qu’il existe entre
l’anthroposystème et l’écosystème du Lamentin et les solutions apportées pour un développement durable. Bien sûr,
tout au long de mes recherches j’intégrerai les apports des droits positifs français et européen.
Tout ce travail de recherche nous permettra de réaliser un véritable diagnostique global et complexe de la société. Ce
diagnostic va permettre de prendre des décisions sociétales à la fois plus précises et plus globales, intégrant l’ensemble
des paramètres décisionnels. D’ailleurs la méthode GAÏA (une méthode d’aide à la décision multicritère) couplée
avec le concept de développement durable, nous dévoile les huit décisions anthropiques possibles : économique ;
équitable (économique + sociale) ; sociale ; supportable (sociale + environnementale) ; environnementale ; viable
(environnementale + économique) ; de développement durable (environnementale + sociale + économique) et enfin
la huitième, l’immobilisme. Il ne reste plus aux acteurs de la société que de déterminer une solution qui leur convient
en toute connaissance de leur cellule sociétale.
PAUL JALBERT
Doctorant, Université Laurentienne, Sudbury
PA_Jalbert@laurentienne.ca
Au sein du foyer : une analyse relationnelle des interactions entre membres d’une famille
La sociologie relationnelle nous permet de passer d’une analyse axée sur l’individu à une analyse axée sur la relation.
Elle ouvre des possibilités pour comprendre l’action humaine et ses dérivés auxquels les modélisations classiques ne
peuvent accéder. La modélisation relationnelle chez Simon Laflamme et ses éléments constitutifs que sont la socialité,
l’historicité et l’émoraison ont déjà été soumis à la vérification empirique. De l’analyse de difficultés de couples, de
projets de vie, de la manifestation de l’intention dans des échanges entre interlocuteurs, de perspectives sur le mariage
jusqu’à des délibérations de comités administratifs, la modélisation relationnelle s’est montrée un meilleur outil
lorsqu’elle est comparée aux modélisations traditionnelles pour comprendre les échanges. Les notions de socialité,
d’historicité et d’émoraison ont déjà été opérationnalisées dans une recherche antérieure de Mélanie Girard et son
travail a fait état de la crédibilité de cette modélisation à l’extérieur du laboratoire.
Malgré ces contributions empiriques importantes, les critiques de la modélisation relationnelle subsistent. Pour y
réagir, nous nous sommes intéressé à la question de l’efficacité d’une modélisation relationnelle à rendre compte
des échanges entre membres d’une famille lorsque ces échanges sont captés en milieu naturel. Dans le cadre d’une
dissertation doctorale, nous avons effectué une recherche où les interactions entre les membres de familles ont
été enregistrées dans leur foyer. Cinq familles canadiennes se sont portées volontaires pour ce projet. Les familles
étaient constituées de deux parents et d’au moins deux enfants d’âge scolaire. Une caméra pouvant capter l’audio et
le vidéo était installée dans une salle de leur résidence pendant une semaine. La caméra s’activait dès qu’il y avait du
mouvement dans la pièce où était la caméra entre 16 h et 23 h pendant la semaine et entre 9 h et 23 h pendant les
fins de semaine. Une fois les enregistrements terminés, la partie audio a été transcrite en prenant en considération la
partie vidéo et une analyse des données a été effectuée.
L’analyse de ces résultats se poursuit actuellement. Nos résultats préliminaires suggèrent qu’en effet, la modélisation
relationnelle peut saisir les nuances des interactions familiales, qu’elle nous offre les outils nécessaires pour
comprendre les dynamiques qui se produisent à l’intérieur des relations entre membres de familles et qu’elle témoigne
d’une souplesse unique dans l’analyse de phénomènes sociologiques. La communication que je propose consistera en
une présentation des résultats obtenus.
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NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
SIMON LAFLAMME
Professeur titulaire, Université Laurentienne
slaflamme@laurentienne.ca
Anthropocentrisme et sciences de l’humain
Le postulat d’un acteur rationnel, autonome, conscient, intentionnel et intéressé a maintes fois été dénoncé,
notamment par les approches relationnelles. Les critiques ont rappelé l’importance de l’inconscient et de l’émotion
dans la psyché humaine, l’impossibilité de comprendre l’action humaine en dehors d’un rapport aux structures
sociales, le caractère illégitime d’une subjectivité qui délibère de façon monadique. À elles seules, ces critiques
auraient dû évacuer depuis longtemps l’axiomatique rationalisante. Pourtant, cette axiomatique ne perd rien de sa
vigueur ; elle continue à dominer les modélisations en sciences humaines. La question se pose de savoir comment elle
fait pour s’éterniser. Il faut bien qu’elle justifie son existence.
Dans un travail récent, nous avons repéré sept manières par lesquelles les spécialistes des sciences humaines
parviennent à légitimer cette axiomatique, qui est au mieux une demi-vérité. Une première consiste à affirmer
sa vérité ; une seconde, à en signaler l’utilité scientifique ; une troisième, à constater que le fait d’y croire n’a pas
d’incidence sur le travail scientifique ; une quatrième, à l’associer à la volonté de prendre en considération la liberté
humaine dans les sciences humaines ; une cinquième, à rappeler qu’elle a été relativisée ; une sixième, à la relier au
sentiment qu’il ne peut y avoir de science humaine que si cette science a pour point focal les individus ; une septième,
à en refuser la critique sous prétexte qu’elle aurait été dépassée par diverses théories : l’interactionnisme symbolique,
l’ethnométhodologie, le constructivisme social, l’antiutilitarisme et la systémique complexe. Or, aucune de ces
justifications ne représente réellement une réponse à la critique relationnelle. Et si l’on peut relever ces justifications
et montrer qu’elles n’en sont pas réellement, c’est forcément qu’il y a quelque chose de sécurisant pour les spécialistes
des sciences humaines à rester sourds à ces démonstrations ‒ qu’ils peuvent difficilement ne pas avoir entendues ou
senties ‒ et quelque chose d’effrayant à s’engager dans des modélisations dans lesquelles il n’y aurait pas comme pierre
angulaire d’acteur rationnel.
Notre intention, dans cette communication, est de mettre en évidence cet aspect sécurisant des modélisations
rationalisantes et ce qu’il y a de terrifiant dans les autres, qu’il s’agisse de celles qui n’ont pas d’acteur rationnel ou de
celles qui ne se fondent par sur l’acteur en lui-même. Nous montrerons que les sciences humaines sont attachées à un
anthropocentrisme qui nuit à leur aptitude à produire de l’abstraction, que cet anthropocentrisme est beaucoup plus
un idéalisme que le résultat d’une analyse, ce qui accentue la difficulté à générer des abstractions opérationnalisables,
et même à donner cours à un relationalisme empirique dans lequel les échanges ne seraient que les rapports entre les
acteurs sociaux. Nous montrerons en outre que l’anthropocentrisme agit comme obstacle au relationalisme dès lors
que cette approche veut s’élever dans l’ordre de l’abstraction pour générer de la science de l’humain.
BRAHIME LAROUZ
Université Moulay Ismail de Meknès, Maroc
blarou@gmail.com
Quelques effets simples de la négociation
L’activité du langage s’exerce dans un univers où règnent l’ambiguïté, l’équivoque et le désaccord: les prémisses et
les conclusions y sont toujours controversables, et l’adhésion des esprits à leur égard pourrait être renforcée ou
contestée. En effet, le caractère polysémique et équivoque du signe linguistique et la complexité des représentations
syntaxiques, culturelles, etc. ne permettent pas d’identifier facilement ou de saisir complètement le sens des énoncés
du langage. Le sens (dans l’interlocution) serait difficilement rétabli dans certains contextes d’énonciation, et plusieurs
interprétations seraient donc possibles.
Dans le cadre de notre communication abordant les effets de sens implicites dus à la présence du morphème négatif
« ne…pas » dans certains énoncés du langage, nous allons expliciter, dans un premier temps, l’hypothèse minimaliste
(Anscombre & Ducrot, 1983), en tant que point de départ, comme premier cadre théorique et nous allons essayer
de montrer comment cette modélisation est en quelque sorte « réductionniste » dans la mesure où elle ne rend
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COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
pas compte de certains énoncés de même nature; ensuite nous aborderons ce que nous avons appelé « l’hypothèse
maximaliste » comme cadre théorique « inverse » à l’hypothèse minimaliste, permettant de rendre compte de certains
effets de sens inverses, impliqués par certains énoncés négatifs construits à l’aide de « ne… pas ». Cette hypothèse
dite « maximaliste » ne nie pas l’apport de l’hypothèse « minimaliste » ; mais au contraire le complète quant à
l’interprétation de certains énoncés négatifs. Nous allons essayer de montrer par la suite les limites de ces deux
modèles précités (i.e. respectivement celui de « l’hypothèse minimaliste » et celui de « l’hypothèse maximaliste ».
En rapport avec le thème du colloque, notre contribution permet de montrer aussi bien la rigueur scientifique des
deux hypothèses évoquées comme outillage méthodologique que leur caractère « réductionniste », puisqu’elles ne
permettent pas une description globale de tous les énoncés.
MARCIENNE MARTIN
Laboratoire ORACLE, Université de l’île de la Réunion,
marcienne.martin@hotmail.com
La pensée systémique analysée à l’aune de l’entropie
De la naissance de l’univers à sa conscientisation par l’homo sapiens, moult évènements transformationnels se sont
produits. La structure de la matière organique qui est l’origine du monde du vivant est née de la combinaison de
différents atomes ; ces derniers ne doivent leur organisation qu’au refroidissement progressif de l’univers accompagné
de son expansion. L’inscription des objets du monde dans cet univers quadridimensionnel ouvre sur nombre
d’interrogations. Le facteur « temps » en est l’élément majeur puisqu’il préside à la transformation de tout substratum
sous-tendant tel système donné.
La naissance du langage chez l’être humain a permis à ce dernier la mise en place de différentes approches cognitives
lui ouvrant la possibilité de comprendre la nature intrinsèque des objets formant le monde, mais aussi de s’interroger
sur la nature de la pensée dont la conscience est l’émanation la plus visible. Avec le langage comme moyen de
transmission, quel que soit l’outil utilisé, la pensée s’appuie sur des phénomènes complexes. Comprendre les objets
du monde induit différentes formes de raisonnement comme le raisonnement logique de type inductif, soit un fait
passant du particulier au général et faisant loi ou encore le raisonnement logique de type déductif, soit le passage
de la loi ou de la règle au fait observé. Quant à la procédure cognitive liée au raisonnement analogique, il est la
mise en relation d’un objet donné inconnu ou dont certains paramètres sont incompréhensibles avec quelque chose
de connu et ayant quelque ressemblance, du moins à travers la représentation qu’en a l’observateur. Les processus
cognitifs engagés sont à l’origine de modes de pensée qui vont de l’observation du réel, à sa représentation ainsi qu’à sa
conceptualisation.
Les découvertes récentes en relation avec la cosmologie (énergie noire, matière noire) et la physique quantique
ont modifié le regard que l’homme porte à son environnement. La complexité des structures qui sous-tend toute
organisation est à l’origine d’un courant de pensée appelé « pensée systémique ». Tout phénomène complexe est alors
retranscrit sous la forme d’un modèle dynamique. Ceci posé, un autre facteur est intervenu dans le mode de pensée
de l’être humain, il s’agit d’une approche scalaire du paradigme du Réel. En effet, l’observation d’une structure à une
échelle donnée, et à une seule, ne permet pas d’en avoir une vision globale quant à son fonctionnement. La pensée
systémique est en relation avec ce phénomène.
Dans le cadre de cette contribution, sera interrogée la relation existant entre ce mode de pensée et l’entropie. Ainsi
les phénomènes d’entropie et de néguentropie sont à l’origine de la transformation des unités composant le monde
du vivant. Schrödinger (1949) a ainsi mis en relation entropie, échanges énergétiques, probabilité et ordre de la vie.
Monod (1960) évoque l’apparition de la vie et, implicitement, de l’homme comme pur hasard. Prigogine réévalue
le questionnement sur la nature du monde du vivant et donc de l’homme à partir des grandes lois de la physique
comme celles de la thermodynamique, dont le premier principe affirme la conservation de l’énergie par tous les
systèmes et dont le second principe (principe d’ordre de Boltzmann) pose qu’un système isolé évolue spontanément
vers un état d’équilibre qui correspond à l’entropie maximale. Peut-on alors considérer le chaos comme délitement ou
comme transformation ? Dans quelle mesure la pensée systémique peut-elle intégrer l’entropie comme phénomène
participant de la néguentropie dans le cadre d’une échelle scalaire plus globale ?
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NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
DENIS MARTOUZET
UMR 7324 CITERES, Université François-Rabelais de Tours
denis.martouzet@univ-tours.fr
De la relation de voisinage à l’injonction urbanistique du vivre-ensemble
La plus ancienne évocation connue du « voisin » date de 1140 (Geoffroy Gaymar, Histoire des Anglais), lui donnant
pour signification « celui qui demeure près d’un autre ». On a d’emblée les deux dimensions principales relevant
des catégories « espace » et « temps » : la proximité et une certaine durée/continuité. L’expérience du voisin suggère
immédiatement que cette relation ne saurait se réduire à la notion géographique de proximité : la durée et/ou la
continuité de cette relation, par leurs conséquences, la « remplissent » concrètement.
Le voisin n’est pas seulement celui qui demeure à côté, mais celui qui, parce qu’il demeure à côté, est déjà chez
nous. Deux indices étayent cela. De nombreux proverbes pointent l’importance du voisin. Il s’agit de s’en méfier
en général (« Choisir ses voisins est plus important que choisir sa maison ») et, plus particulièrement, en ce qui
concerne la proximité (« Quand la maison de ton voisin brûle, apporte de l’eau à la tienne »). Mais il peut y avoir
de bonnes relations de voisinage (« Bien en sa maison qui de ses voisins est aimé »), à préserver (« Une haie entre
voisins préserve l’amitié »). Cependant, les relations humaines sont telles qu’elles peuvent contenir de la jalousie
(« Les pommes du voisin sont les meilleures »), des possibilités de profiter (« Si ma barbe brûle, les voisins viennent
y allumer leur pipe »). Enfin, le voisin est un amplificateur : il n’ignore pas ce qui se passe à l’intérieur de chez soi et
n’a aucune raison de ne pas le divulguer (« L’influence d’un mauvais voisin se fait sentir jusqu’au bout de la ville »),
surtout les aspects négatifs (« Un mauvais voisin tait vos bonnes qualités et divulgue vos défauts »).
Second indice, plusieurs séries d’enquêtes menées dans le cadre de la compréhension de la relation de l’individu à
l’espace ont montré l’importance de la sociabilité de proximité. En guise d’exemple archétypal, que penser de ce jeune
homme vivant seul dans son logement et qui s’exclame « chez moi, c’est bien, les gens sont sympas ! » ? Le voisin est
déjà chez lui. D’autres discours en présentent une version négative.
D’autre part, il est demandé à la ville – parce qu’elle s’est étendue, parce que la durabilité des espaces et des pratiques
est devenue un argument de discours et un critère de choix, parce qu’elle porte en elle les germes de conflits potentiels
liés à la coprésence – d’être dense. Cette densité, déjà là mais à conforter, conduit à des injonctions sociétales et
politiques qui se traduisent en termes urbanistiques par les mots-valises « vivre-ensemble », « mixité sociale » et des
références au quartier, au village… On peut considérer que ce sont les traductions de l’accentuation des conséquences
positives et négatives – surtout négatives – de la densification. Si « l’enfer c’est les autres », le voisinage est la
dimension spatiale de cet enfer et l’urbaniste a pour mission de le rendre vivable.
Les formulations de ces injonctions sont multiples et si la mixité sociale est clairement et explicitement évoquée (bien
que mal définie, notamment en termes d’échelle spatiale) dans les textes de loi, les documents de planification spatiale
et les documents relatifs aux opérations d’urbanisme, le vivre-ensemble apparaît plutôt comme un slogan comme
en attestent les campagnes publicitaires nombreuses des collectivités locales (dont l’analyse graphique montre la
simplicité du message à faire passer opposé aux difficultés réelles de ce vivre-ensemble et de sa mise en œuvre).
Notre objectif est l’intelligibilité de cette relation de voisinage mais surtout des relations (dans cette relation) entre
espace et temps, entre intérieur et extérieur, entre réalité (présence du voisin) et virtualité (potentialité d’action ou
d’influence du voisin) et des difficultés d’application de l’injonction au voisinage.
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COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
CLAUDE VAUTIER
LEREPS, Université Toulouse 1 Capitole
claude.vautier@ut-capitole.fr
De l’intérêt de l’approche relationnelle dans la modélisation des systèmes complexes
Le paradigme de l’approche relationnelle, a besoin d’être clarifié, notamment dans ses relations avec la systémique
complexe.
Les approches moriniennes de la complexité, développées longuement, particulièrement dans La Méthode 1 à 6,
semblent devoir être posées comme un acquis sur lequel et à travers lequel nous devons construire. L’approche
relationnelle, telle que proposée par Emirbayer, Donati et quelques autres dont Simon Laflamme, ouvrant la voie la
plus récente et la plus radicale, a besoin d’être instituée plus fondamentalement.
La mention, dans l’énoncé de mission de la revue NPSS, des deux branches précédentes a peut-être quelque chose
de pléonastique : l’approche relationnelle est forcément une approche systémique complexe. Cependant, est-il aussi
certain que toute pratique de la systémique complexe soit relationnelle ?
En affirmant que tout phénomène socio-humain doit être envisagé dans sa globalité (approche par l’organisation, la
relation, approche interdisciplinaire) en même temps que dans ses singularités (ce qui nous ouvre à l’hologrammie,
la dialogique, la contradiction, l’unitas multiplex), dans son historicité (auto-organisation, émergences), l’approche
relationnelle se réfère à tous les concepts centraux de la complexité telle que la définit Edgar Morin.
Cependant, la systémique complexe est aujourd’hui portée par des courants divers dont une part importante
semble implicitement se situer dans une approche « individualiste » au sens où elle considère qu’un système est une
émergence issue d’interactions entre des acteurs. Dans cette acception, la systémique complexe ne paraît pas réaliser
les recommandations de l’analyse relationnelle, puisque celle-ci puise ses fondements dans l’idée qu’un phénomène
socio-humain doit toujours être envisagé en ne privilégiant ni l’entrée individualiste (l’acteur autonome, source
du social), ni l’entrée holiste (le système autonome, source du social), ni même une approche « mixte » ou holindividualiste, mais en se centrant sur le concept de relation.
Il semble donc nécessaire de clarifier les liens étroits, mais parfois ambigus, entre études relationnelles et systémique
complexe. Il paraît, dans ce cadre, utile de suggérer l’intérêt d’une tentative d’opérationnalisation complexe inscrite
hors du champ exclusif de l’individualisme méthodologique et du holisme méthodologique tout en affirmant
clairement la nécessaire prise en compte de l’historicité de ses « objets ».
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Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LA PENSÉE SYSTÉMIQUE COMPLEXE ET RELATIONNELLE
MARGOT VERDIER
Doctorante, contractuelle ; UMR SOPHIAPOL –
Université de Nanterre Paris Ouest, France
verdiermargot@gmail.com
Coopération et conflictualité dans les squats anarchistes.
Le processus de socialisation à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes
La différenciation croissante des individus par la multiplication des rôles et des rapports à ces rôles, engendre un
décalage avec des structures de coopération politique fondées sur le consensus. L’émergence d’une conflictualité
intense et diffuse invite à repenser les termes de la confrontation. Malgré les rôles positifs qu’on lui a attribué
(Simmel ; 1995), le conflit est généralement appréhendé comme un problème d’ajustement dont les conséquences
dépendent de ses modalités de gestion (Horowitz ; 1962). L’étude des systèmes sociaux anarchistes, fondés sur
une organisation collective de la différenciation individuelle, permet de réemployer le modèle d’analyse hérité du
fonctionnalisme parsonien, en le renversant.
Cette communication interroge le rôle du conflit dans les structures sociales de ces groupes, en le considérant comme
une norme de comportement issue de l’institutionnalisation des valeurs anti-autoritaires. L’exposé traite de la place
et de la forme de la conflictualité dans le processus de socialisation dont la fonction est d’assurer la stabilité du
système en inculquant les valeurs et les normes organisant la coopération interindividuelle. Ces résultats seront mis
en perspective par l’analyse des échanges entre ce sous-système normatif et le sous-système politique dont le rôle est
d’organiser cette coopération (Parsons ; 1983).
Nous nous appuyons sur un terrain de 6 mois conduit en 2013 à la ZAD (Zone d’Aménagement Différé) de NotreDame-des-Landes. Ce village autogéré est né de l’occupation de champs et de forêts contre la construction d’un
aéroport international. Il représente le lieu de vie principal d’environ 300 personnes et un espace de convergence
pour plusieurs centaines d’autres qui, allant et venant, constituent le réseau liant la lutte à différents milieux militants.
Les valeurs de base des occupants s’inscrivent dans les traditions anarchistes et autonomes et fondent l’essentiel des
normes et des structures du système. On rencontre cependant également de nombreuses personnes sans bagage
militant : « nomades », « zonards », « néo-ruraux », anciens militaires, etc. Une attention particulière a été portée
à leurs modalités de socialisation, d’intégration et de participation aux processus de décision. La méthodologie a
principalement mobilisé les outils de la participation observante (Abercrombie, Hill, Turner ; 2000) et de l’entretien.
La plupart des individus arrivent seuls sur la ZAD. Certains s’installent d’abord à la Châtaigne, lieu d’accueil, avant
de se répartir dans différents sous-groupes « affinitaires ». C’est notamment le cas de ceux qui, ne s’inscrivant pas
dans des réseaux militants, ne connaissent personne et n’avaient pas prévu de rester. Certaines normes leurs font
généralement défaut : volonté d’engagement dans l’organisation collective ; perspective critique sur les dominations
– notamment de genre ; présentation politique de soi ; capacité à écouter et à s’exprimer de façon non-violente. Ce
sont ces normes de comportement qui fondent les modalités de communication exigées au sein du sous-système
politique. Le processus de socialisation passe justement par un type de rencontre dont les caractéristiques permettent
– dans une certaine mesure – l’apprentissage de ces compétences. Avant d’être interrogé sur son profil social (âge,
profession, études, etc.), l’individu est entraîné dans des débats. La polémique est structurée selon trois modalités :
la relativisation rhétorique des opinions permet de libérer la parole, l’incitation au positionnement encourage
l’affirmation individuelle tandis que la volonté de conviction vise à l’inculcation des valeurs anti-autoritaires.
La conflictualité dans laquelle l’individu apprend ainsi à entrer, fonde un système destiné à faire émerger une
différenciation individuelle radicale et un modèle d’organisation associationniste. La communauté est en effet
reconstruite sur la base d’une libre circulation de l’individu entre des groupes unis soit par des affinités culturelles
et politiques, soit par les nécessités de la production, de l’échange et de la lutte. C’est donc sur l’intériorisation d’un
certain type de conflictualité que reposent les structures d’un système fondé sur des valeurs anti-autoritaires.
Pour souligner le 10e anniversaire de la revue
NOUVELLES PERSPECTIVES EN SCIENCES SOCIALES
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Ce colloque vise à regrouper des chercheurs de différents pays
afin de favoriser des échanges de connaissances et de susciter des
débats et des avancées sur les problématiques de la systémique
complexe et des études relationnelles.
Le colloque donnera l’occasion à ses participants d’assister à
plusieurs séances interactives qui aborderont des sujets variés sur la
pensée systémique complexe et relationnelle.
laurentienne.ca/npss2015
Le bureau des affaires francophones
La faculté des arts