www.cheminotcgt.fr ISSN 0240-4265 Perspectives syndicales Le journal des cadres et agents de maîtrise cheminots de la CGT ♦› Dossier • P. 4 la sécurité ferroviaire : un bien commun ! Offrir aux cheminots la possibilité de parler de leur travail, de la sécurité ferroviaire (enquête sécurité) ne garantit pas un plan d’actions conforme aux attentes et aux besoins. Pour l’UFCM-CGT, la réforme doit offrir l’opportunité de réinterroger l’ensemble du système de sécurité. ♦› Entreprise © Caroline Blanchot SNCF Réseau crée la direction générale Ile-de-France page 2 ♦› R evendicatif Retraites complémentaires : les financements existent ! ♦› R evendicatif Viséo : l’impact sur RH page 8 page 7 n°373 avril 2015 - 0,8 e ♦› Entreprise Une gestion du type RATP pour l’Ile-de-France ? La direction a décidé de créer une Direction Générale Ile-de-France (DG IDF) à Réseau pour pallier le déficit d’entretien des 30 dernières années, mettant ainsi en attente les opérations de province et continuant à offrir, par la même occasion, un marché juteux au privé. Elle a nommé à sa tête l’ex directeur général adjoint de la RATP : Yves Ramette. L’Ile-de-France devrait donc « servir de laboratoire grandeur nature à la réforme ferroviaire regroupant les équipes de RFF, de SNCF Infra et de la DCF Ile-de-France. » Le secrétaire d’Etat aux Transports Alain Vidalies et les dirigeants de la SNCF ont annoncé un report (de 2015/2016 à 2017) de 15 à 20 chantiers de réaménagement de gares et d’une demi-douzaine d’opérations de renforcement de la signalisation. L’Ile-de-France échapperait à cette logique puisque de nombreux projets de développement sont programmés simultanément à l’augmentation du niveau de régénération. La création de l’entité DG IDF a été annoncée dans le contexte d’une augmentation des investissements sans précédent. Mais quels vont être les impacts de ces décisions sur les organisations et conditions de travail des cheminots ? La création de la DG IDF se réalise autour de 4 métiers (accès réseau, circulation, maintenance travaux et ingénierie). Malgré un rattachement hiérarchique propre à la DG IDF, ces 4 métiers conservent toutefois une dimension fonctionnelle dans la mesure où ils restent en relation avec les métiers nationaux existants. La création de cette entité est un pis aller démontrant clairement que la structuration géographique de l’entreprise ne répond pas aux enjeux. Dans ce contexte, sous prétexte de remplir les objectifs, sous-traitance et productivité sont les solutions annoncées. Un financement qui augmente… au service d’intérêts Privés ! La dotation financière de cette structure est sans précédent. Selon le Directeur Général de l’IDF, elle passerait de 300 millions d’euros à 1,7 milliard par an durant les 5 prochaines 2 - Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 années. Aujourd’hui, 50 % des lignes d’IDF ont plus de 35 ans. L’amélioration de la qualité de service doit passer par une remise en état du réseau et une modernisation de la signalisation. La région parisienne est ainsi érigée en priorité nationale. Sur l’année 2014, 800 embauches ont été réalisées sur ce périmètre, principalement des maîtrises et cadres. Le directeur de la DG IDF annonce des chiffres similaires pour 2015. Essentiellement dans les métiers de l’ingénierie projet et de la maintenance travaux. Pour la CGT, cette augmentation de moyens en IDF est surtout due au sousinvestissement de l’Etat depuis trente ans. A cet égard, les annonces d’embauches restent insuffisantes au regard des enjeux des prochaines années pour le réseau Francilien, ce qui traduit une volonté d’augmenter la soustraitance. De plus, ces choix de concentration des moyens ne doivent pas ralentir les investissements nécessaires en province. La RATP n’a pas séparé le GI de l’EF ! La RATP est un EPIC qui travaille sous certificat de sécurité de la SNCF sans avoir eu à séparer GI et EF, si ce n’est d’un point de vue comptable. Contrairement aux revendications de la CGT, la direction de la SNCF nous a toujours opposé une fin de non-recevoir sur le sujet, se retranchant derrière des contraintes liées à Bruxelles, alors que cela relève clairement d’une volonté délibérée de démembrement de l’entreprise publique. L’éclatement en trois EPIC distincts va à l’évidence complexifier le système au sein du nouveau GPF. En IDF, cette perspective a fortement inquiété le STIF. Pourtant, la création de la DG IDF ne va pas régler les dysfonctionnements quotidiens des EIC parisiens (sous-effectifs, nombreuses demandes de mutations, vétusté des postes, charges travaux en augmentation permanente…). Elle ne règlera pas non plus les problématiques liées au sous dimensionnement des Infrapôles/Infralog et des Pôles Régionaux Ingénierie poussés à une externalisation sans précédent et sans vision. La création de la DGIDF et la nomination d’Yves Ramette (ex RATP) orientent la gestion de la circulation en zone dense IDF vers une gestion par lignes dédiées Transilien. Pour lui, les CCR à venir doivent être de vrais PCC (type RATP), il souhaite aussi plus d’interopérabilité et de travail en commun entre la RATP et la SNCF (DCF et Transilien). Les conditions de travail des agents de la RATP du CCU de Denfert-Rochereau ne sont pas rassurantes. Une partie du financement des travaux en IDF risque de se faire au détriment ou au report de travaux prévus en Régions. Mathieu Vilela © Caroline Blanchot Financement : tout pour l’Ile-de-France ! ♦› Editorial ♦› AGENDA La formule « j’aime l’entreprise » de Manuel Valls devant le MEDEF, en août dernier, n’est pas passée inaperçue. Dans son essai, (L’erreur de calcul, Ed. du © Pascale Lalys Cerf), Régis DEBRAY note que « la relation du Chef du gouvernement aux Chefs d’entreprises privées n’est plus d’utilisation mais de fascination ». Il ajoute que ce qu’il a vu, « c’est un enfant du siècle transi par sa grande illusion, l’erreur de calcul qui nous bouche la vue et s’en prend ♦› J ournée de mobilisation interprofessionnelle Les organisations syndicales CGT, FO et Solidaires s’engagent dans un processus de mobilisation pour une journée de grève interprofessionnelle et de manifestation le 9 avril 2015 pour l’emploi, les services publics, les salaires/retraites/minima sociaux. à nos vies ». Cette idée se confirme après le vote de la loi Macron, dont la première mouture osait l’interdiction de communiquer toute information relevant du « secret des affaires ». Sans l’intervention de l’Ugict-CGT, toute malversation, corruption ou prévarication liée à la « vie des affaires » aurait été sanctuarisée. A l’ombre de cette omerta institutionnalisée, des scandales comme celui d’HSBC auraient été étouffés et la puissance publique, le fisc, n’auraient pas récupéré 1,1 milliard de caution. De plus, le ♦› C olloque Ugict CGT Dans le cadre des 120 ans de la CGT, l’Ugict CGT organise le 6 mai à la confédération a Montreuil, un colloque intitulé : évolution du salariat, des qualifications, du travail : quelle CGT, pour quel avenir ? citoyen/la citoyenne à l’origine de l’information aurait encouru une peine de 5 ans de prison et une amende de 375 000 € ! Nos directions ne se gênent déjà pas pour sanctionner ou écarter des collègues qui contestent un projet de réorganisation, dont ils pointent les incohérences et encore plus s’ils en exposent clairement les dangers. Régis DEBRAY, toujours dans le même essai, estime que la France « est devenue une grande entreprise », il est ♦› C onseil National de la Fédération CGT des Cheminots La Fédération CGT des Cheminots tient son conseil national les 12 et 13 mai à Montreuil. vrai qu’avec la tendance à la marchandisation de l’ensemble des activités humaines, il ne restera bientôt plus que l’air qui sera gratuit… Mais le sujet du secret des affaires risque de revenir puisque l’Union Européenne concocte une directive sur le sujet. L’Ugict CGT, Eurocadres et de nombreux partenaires lancent un appel contre cette directive. Pour la démocratie et ♦› S tage national UFCM-CGT L’UFCM-CGT organise son stage national à Courcelle la semaine du 8 au 12 juin 2015 (quelques places sont encore disponibles). contre la mafia des « affaires », l’oligarchie et son petit personnel politique à la manœuvre, développons la vigilance et la surveillance citoyenne et syndicale ! Hervé Pagès Publication mensuelle de l’Union Fédérale des Cadres et agents de Maîtrise CGT cheminots - Case 546 - 93515 MONTREUIL CEDEX Tél. 01 55 82 84 40 - Fax 01 48 57 95 65 - e-mail : ufcm@cheminotcgt.fr ♦› R assemblement Ugict-CGT L’Ugict-CGT organise à la Défense un rassemblement des Ingénieurs, Cadres, Techniciens et Agents de Maîtrise le 17 juin prochain. ♦› C onseil National de l’UFCM-CGT L’UFCM-CGT tient son conseil national les 23 et 24 juin à Montreuil. Directeur de la publication : C. Blanchot Tirage : 6 500 exemplaires Numéro commission paritaire 1011 S 05854 Dépôt légal 2ème trimestre 2015 Imprimerie : VOLUPRINT, AUXERRE - 03 86 18 06 00 Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 - 3 © Caroline Blanchot ♦› Dossier Sécurité, une enquête, une convention … 3 petits tours et puis s’en vont ? L’accident de Brétigny et ceux qui ont suivi ont causé un traumatisme dans la corporation. Il est d’autant plus profond dans les catégories encadrantes que derrière la communication d’indicateurs de « performance » plutôt satisfaisants, le ressenti général en matière de sécurité montrait une inquiétude grandissante. La convention nationale sécurité du 3 février 2015 est loin d’avoir rassuré. Une situation fragilisée… S’il est un domaine où il faut savoir rester humble, c’est bien celui de la sécurité ferroviaire car rien n’est jamais définitivement acquis. Les accidents, incidents, quasi incidents et autres ESR (évènements sécurité remarquables) nous le rappellent tous les jours et quelquefois – trop souvent – de manière tragique. Pourtant, il convient de noter que le rapport sur la sécurité présenté tous les ans au CCE ainsi que les audits sécurité réalisés régulièrement, alertent depuis des années sur des points faibles récurrents, particulièrement dans les établissements du matériel et de la maintenance de l’Infrastructure (documentation sécurité en discordance, non-respect des procédures, volume et qualité de la soustraitance…) et plus récemment dans les établissements Fret. …dont les causes sont connues L’impasse financière dans laquelle est maintenu le système ferroviaire depuis des décen- 4 - Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 nies a entraîné une politique de sous-investissement et des économies drastiques (à ne pas confondre avec la productivité) sur la maintenance du réseau, des installations et du matériel roulant. L’entreprise renonçant même à effectuer certaines tâches pourtant reconnues nécessaires : le retard pris dans le débroussaillage des abords l’illustre à la perfection. Certes, les évolutions techniques ont permis à la fois une augmentation de la productivité et une réelle diminution de la pénibilité, mais elles ont surtout servi à diminuer les effectifs : 20 000 emplois ont disparu en 10 ans. Cette période est marquée par les restructurations incessantes, la baisse des formations, le « turn-over » des dirigeants, des parcours et cursus de carrière en rupture avec la culture traditionnelle de l’entreprise et l’augmentation des responsabilités et charges de travail individuelles. C’est sur cet ensemble de causes que l’UFCM souhaite agir. En premier lieu, par l’assainissement de la situation financière afin de définir une politique d’investissements et de maintenance qui s’appuie sur les technologies nouvelles au service de l’homme. En second lieu, sur l’amélioration des conditions de travail et des parcours professionnels, le retour et la stabilisation d’organisations à taille humaine, le volume et le contenu de la formation, la reconnaissance des qualifications… car c’est toujours sur l’homme que la sécurité repose en dernier recours. Après les accidents, un plan d’actions Il faut toujours rester prudent sur les causes des accidents, pour celui de Brétigny les enquêtes sont d’ailleurs toujours en cours puisque les juges en charge de celles-ci ont ordonné un complément d’expertise ferroviaire et métallurgique le 26 février dernier. Il n’en demeure pas moins que très rapidement, la direction annonçait un plan d’actions baptisé « Vigirail », celui-ci comprenait trois volets : • Des actions immédiates de vérification des aiguillages de même type. Une campagne a été effectuée entre le 14 et le 29 juillet, elle a été complétée par des observations complémentaires portant sur le comportement des programmes d’actions de VIGIRAIL, la publication des résultats sur le ton du satisfecit n’est pas acceptable pour les cheminots dont la sécurité est à la fois la 1ère valeur et un motif de fierté. Sans faire de catastrophisme mais pour être constructifs, nous pensons que la direction aurait dû faire preuve d’humilité dans ses présentations des conclusions : tout ce qui n’atteint pas les 100 % est pour nous un sujet d’alerte, par exemple : © Caroline Blanchot • 3 8 % (40 % chez les managers) des agents ayant répondu à l’enquête pensent que la sécurité régresse. Plus de 40 % (dont 1 DET sur 3) estiment que l’entreprise ne se donne pas les moyens de ses ambitions en termes de sécurité. Ainsi, la question de la stratégie et des moyens est clairement posée. des assemblages complexes que constitue le type d’appareil incriminé : les « traversées ». • La création d’un réseau d’experts internationaux avec des experts ferroviaires étrangers suisses et allemands ainsi que d’autres secteurs industriels susceptibles d’être concernés par des problématiques en partie similaires. Par ailleurs, la mise en place d’un observatoire social « Sécurité et Maintenance » pour associer les organisations syndicales aux différents enseignements tirés de la catastrophe de Brétigny, ainsi que des mesures qui seront prises. • Le plan VIGIRAIL 2014/2017 avec 6 programmes d’actions : - Poursuivre l’accélération du programme de renouvellement des appareils de voies, - Equiper les personnels de maintenance d’outils de type « tablettes digitales », - Déployer des modes innovants de surveillance, - Renforcer la prévention sur les règles de surveillance des aiguillages et des éclissages, - Réinventer les formations avec de nouvelles technologies, - Création de la plateforme « Alerte Express ». Ils partirent 52 000… Plus de 52 000 agents, soit 34.5 %, ont répondu à l’enquête sécurité réalisée du 8 septembre au 17 octobre 2014. Comme pour l’annonce • 1 /3 des DU et/ou DPX se sentent mal à l’aise pour contrôler les agents dont ils ont la responsabilité pour diverses raisons, cela doit interpeller et appelle des actes concrets en leur direction en termes de moyens, de formation initiale, de prise de poste… • L a défiance de toutes les catégories de personnels vis-à-vis de la sous-traitance atteint un niveau tel qu’il ne peut s’expliquer par un simple réflexe corporatiste. Cela mériterait pour le moins que les projets d’entreprise « Excellence 2020 » et « Réseau 2020 » soient revus dans leur ambition annoncée de développer cette sous-traitance. • La dictature de la ponctualité conduit souvent à une non application stricte des procédures. Le niveau reconnu pose la question de l’efficience du contrôle interne. La simplification ou l’allègement ne peuvent être la seule réponse à des problèmes d’organisation, de manque de moyens et d’économies de compétences. Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 - 5 ♦› Dossier …ils arrivèrent 600 au spectacle Le 3 février 2015, 600 managers étaient réunis pour assister au show de présentation du programme « excellence sécurité ». A grand renfort de vidéos et de jingles agressifs, les trois animateurs Frédéric Saint-Geours, Guillaume Pépy et Jacques Rapoport ont orchestré la prestation des 6 candidats au radio-crochet du verre déformant par lequel sera désormais vue la sécurité. Le programme prend donc la forme d’un engagement personnel des deux présidents. Six dirigeants sont responsables d’une facette du plan « PRISME » présenté dans le « Temps Réel » du 4 février. Mme Dalibard est responsable de « Développons un comportement Proactif », M. Krakovitch de « Installons un système d’analyse par les Risques », M. Solard de « Maîtrisons les Interfaces entre les entités jusqu’aux établissements », M. Larieu de « Simplifions les procédures et la documentation », Mme Tilloy de « Créons les conditions Managériales pour que chacun s’implique » et M. Longequeue de « Dotons-nous des outils et des Équipements à la pointe ». En conclusion, M. Pépy saupoudrait quelques moyens et recommandations tels la dotation de 15 M€ supplémentaires pour débroussailler et entretenir les pistes, l’obligation de commencer toutes les réunions par un point « 5 minutes » sur la sécurité, l’utilisation des méthodes d’excellence opérationnelle pour la sécurité et la dotation de 100K€ à chaque directeur d’établissement pour traiter les irritants. Enfin, les postes de pôle sécurité, dans les branches, dans les activités, dans les métiers seront obligatoirement des postes à temps plein. La réforme offre l’opportunité de réinterroger l’ensemble du système de sécurité Le transport ferroviaire est un mode techniquement complexe et intégré dont la sécurité est maîtrisable à condition que les rôles et les responsabilités de chaque acteur intervenant dans la chaîne soient clairement identifiés. Au regard des évolutions intervenues ces dernières années, la démarche engagée par la direction et la période de mise en œuvre de la réforme constituent un espace d’intervention syndicale inédit dont nous devons nous emparer. Jusqu’en 1997, la SNCF, sous tutelle de l’Etat, était l’acteur central de la sécurité du système ferroviaire. La question de la cohérence a commencé à se poser avec la création de RFF en 1997, et encore davantage depuis quelques années avec l’apparition de nouveaux acteurs. La réforme, qui se met en œuvre, traite une partie des dysfonctionnements en réunifiant la gestion de l’infrastructure. Mais d’autres changements méritent un retour d’expérience pour mesurer l’impact sur le management du système de sécurité : • La multiplication des espaces d’intervention de la puissance publique : si l’État demeure au centre, les niveaux européen et régional ont acquis une place structurante, soit comme initiateurs de profondes transformations du paysage ferroviaire français, soit comme autorités organisatrices. • L ’émergence d’organismes publics indépendants chargés de la régulation du secteur (ARAF) ou de la sécurité ferroviaire (EPSF). • L es évolutions de la SNCF organisée par branches responsables de la sécurité de leurs outils de production. • L ’affirmation de l’indépendance de la DCF et l’intervention sur le réseau de nouveaux acteurs (concessionnaires partenaires privés des PPP, OFP sur des lignes fret à faible trafic…) • L ’apparition de nouvelles entreprises ferroviaires (29 à fin 2014). • L a multiplication par deux des travaux d’infrastructure, faisant intervenir de nombreuses entreprises et introduisant des contraintes d’accès au réseau. • L a modification de l’esprit de la réglementation technique européenne, limitée désormais aux objectifs et non aux moyens, à travers notamment les spécifications techniques d’interopérabilité. • … Tout cela ne peut pas être sans effet sur la gestion des systèmes de sécurité d’autant plus que les situations de « co-activité » et les interfaces se sont multipliées. La réforme en cours confirme la complexité du système et la présence de nombreux acteurs. Il faut aussi souligner qu’en donnant davantage d’indépendance aux activités et encore plus dans le cadre de séparation en EPIC différents dont les objectifs sont avant tout financiers, on crée de nouveaux risques. Par exemple, on peut avoir tendance à cacher encore plus la vérité, au vu des conséquences financières potentielles et donc au détriment de la sécurité. Dans ce contexte, concevoir la sécurité ferroviaire comme un bien commun auquel tous les acteurs doivent concourir est une nécessité, c’est dans ce sens que l’UFCMCGT entend se saisir de ce moment historique pour intervenir dans la nécessaire reconfiguration du système de sécurité. Les directions nous refusent tout débat sur l’organisation de la production, et ce qui a trait à la sécurité tout autant que le reste. Nous pouvons saisir la période pour aborder ces questions avec nos collègues, poser des questions concrètes, en particulier sur toutes les carences qu’on laisse régler par les acteurs locaux. Alain Prouvenq 6 - Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 ♦› Revendicatif AGIRC et ARRCO : les financements existent ! Au cours du printemps 2015, se tiendra une négociation importante autour de la situation financière de l’AGIRC et de l’ARRCO et par voie de conséquence du financement des retraites complémentaires. L’enjeu est de taille puisque l’AGIRC compte pour l’essentiel de la retraite complémentaire des cadres et assimilés et qu’il s’agit de rétablir des équilibres financiers de l’AGIRC et de l’ARRCO particulièrement menacés. Cette négociation concerne tous les salariés. Et les cheminots au Statut le seront également très vite dans la mesure où le gouvernement ne cache pas son intention d’étendre aux régimes spéciaux les mesures que les organisations syndicales, patronales et salariales adopteront. Une négociation pour trouver un équilibre financier Les négociations de 2015 ont pour objectif de rétablir les équilibres financiers de l’AGIRC et de l’ARRCO, ébranlés par le chômage, l’austérité salariale et le refus de mettre les revenus financiers à contribution. À ceci s’ajoute le refus persistant du MEDEF d’accroître les ressources des régimes à hauteur des besoins. Dans cette négociation, le débat se polarise autour de deux possibilités. Abaissement des droits à la retraite comme le veut le MEDEF ou augmentation des ressources pour financer des retraites de qualité comme le proposent les syndicats, notamment la CGT. Le MEDEF veut réduire les droits à retraite 1. Reculer l’âge effectif de départ en retraite : le droit à une retraite à 62 ans deviendrait fictif parce que les salariés devraient différer leur départ en retraite dans les régimes ARRCO et AGIRC. 2. Réduire le niveau des pensions. À cet effet, le MEDEF propose de : - supprimer la Garantie Minimale de Points (GMP) accordée à tout cotisant à l’AGIRC, soit, pour les cadres concernés, une perte annuelle de pension de l’ordre de 2 089 € pour 40 années cotisées ; - remplacer l’ARRCO et l’AGIRC par un régime unique fonctionnant « à cotisations définies ». Le taux de cotisation est fixé « une fois pour toutes », ce sont les prestations qui s’ajustent automatiquement à la baisse. Ce système a conduit en Suède à une baisse de 10 % en 4 ans du montant des retraites. 3. Baisser les futures pensions de réversion qui représentent aujourd’hui 60 % de la pension du conjoint décédé. Celles-ci permettent pourtant de réduire de 35 % l’écart de pension entre les femmes et les hommes. La CGT et son UGICT proposent d’augmenter les ressources pour financer un bon niveau de retraite Les reculs voulus par le Medef n’ont rien d’inéluctable. Augmenter les salaires, faire baisser le chômage ou mettre les revenus financiers à contribution permettraient de financer des retraites de haut niveau. Dans le cadre des négociations, la CGT et son Ugict font 3 propositions immédiatement applicables qui permettent de résorber les déficits et de préserver le niveau des pensions. Nous avons demandé aux services de l’AGIRC et de l’ARRCO de les chiffrer : 1. L’égalité salariale entre les femmes et les hommes : progressivement réalisée, elle permettrait un accroissement des cotisations tel que tout déficit serait effacé à l’ARRCO. Quant au déficit de l’AGIRC, il serait réduit d’ici 2040 de 46 %. 2. L’alignement des taux de cotisation appliqués pour la retraite au-dessus du plafond de la Sécurité sociale sur ceux pratiqués en-dessous : soit une augmentation de 0,93 point de la part salariale des cotisations AGIRC pour rétablir l’équilibre financier. Par exemple, cela représenterait pour un salaire Bon à savoir Pour se constituer leur retraite, les cadres et assimilés cotisent, sur la partie de leur salaire inférieure ou égale au plafond de la Sécurité sociale, à un régime de base ainsi qu’à l’ARRCO, le régime complémentaire de l’ensemble des salariés du privé. Au-dessus de ce seuil, ils cotisent exclusivement à l’AGIRC, le régime complémentaire des cadres. Les cheminots au Statut donc au régime spécial ne sont pas affiliés aux retraites complémentaires. mensuel de 4 000 € brut, 7, 72 € de plus cotisés chaque mois. Cette mesure suffirait à rétablir l’équilibre financier de l’AGIRC. 3. L’instauration d’une cotisation strictement patronale, au taux de 10 %, sur les éléments de rémunération non soumis à cotisation dans les régimes complémentaires (intéressement, participation, épargne salariale, etc.) : d’ici 2040, les déficits de l’AGIRC seraient réduits de 24 % et de 74 % pour l’ARRCO. La CGT et son Ugict proposent de débattre de ces propositions avec les autres organisations syndicales et les salariés. Faisons-nous entendre pour que cette négociation débouche sur un accord qui garantisse et conforte nos droits à retraite ! Retrouvez tout le dossier sur : ugict.cgt.fr/agirc Suivez les négociations en direct sur Twitter avec #NegoRetraites Caroline Blanchot Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 - 7 ♦› Revendicatif Viséo met RH sur la touche et la SNCF hors la loi ! Avec son objectif de « renforcer l’efficacité et le dialogue entre collaborateurs, managers et acteurs RH », Viséo traduit l’obsession de rationalisation de tous les aspects de la vie de l’entreprise et débouche sur un mode de gestion déshumanisée des salariés. Il tient d’une vision du management qui fait du salarié un produit amené à se « vendre » sur le marché de l’emploi interne. Cette conception inverse la responsabilité de l’employeur. Il n’a plus à fournir une activité au salarié qu’il a embauché mais c’est à celui ci de prouver qu’il a une utilité. Des conceptions arbitraires des évaluations « Etre acteur de son projet professionnel, valoriser ses compétences », autant d’expressions qui traduisaient déjà un effacement de la responsabilité de la DRH dans la gestion des compétences des personnels. Viséo franchit une nouvelle étape dans la « libéralisation » du marché du travail interne, raccourcit les circuits de mise en relation de « l’offre et de la demande » avec pour effet, une déshumanisation des relations professionnelles et une dérégulation des modes de fonctionnement. Nul doute que ce nouvel outil trouve sa finalité dans la recherche d’une réduction de coûts qui tient lieu de pensée unique dans notre entreprise. Tous ceux qui sont soumis à l’épreuve de l’EIA ont été informés de la mise en place de Viséo. Les managers ont découvert que cet outil allait nourrir les comités de Carrière. Un reporting de plus pour eux ! La note de présentation aux managers contient de véritables perles dénotant une conception autoritaire de l’évaluation des cadres. L’on y découvre ainsi la nécessité pour un cadre d’« incarner les valeurs de la SNCF ». Le verbe « incarner » est très fort et renvoie à un registre de l’engagement qui rappelle des conceptions religieuses. Quelques lignes plus bas sur la même page, le document présente les « compétences clés d’un cadre ». La 7ème retient l’attention : l’adhé- 8 - Perspectives syndicales - n° 373 - avril 2015 concernant l’utilisation de mots lourds de sens, inscrits sur un document national, servant de référence à l’évaluation de plusieurs dizaines de milliers de salariés ! Rappelons que la présence de tels items a fort heureusement été prohibée par des arrêts de la cour de cassation. Aussi, nous invitions d’ores et déjà les managers à la prudence, et, a minima, à se refuser à évaluer un « niveau d’adhésion ». Avec Viséo, les dirigeants mettent en œuvre un outil de recrutement déshumanisé, sans surveillance RH, qui va « classer » les candidats sur la base d’évaluations arbitraires. Il nous incombe de mettre en garde nos collègues contre des orientations malsaines et des évaluations dangereuses, contraires à l’éthique et illicites. sion aux orientations de l’entreprise… Ainsi, non seulement les cadres doivent, dans le cadre d’activités professionnelles « incarner » des valeurs, mais ils se voient de surcroit enjoindre d’« adhérer » aux orientations. Outre l’incroyable suffisance de cette exigence, qui amène le malheureux cadre à répondre aux injonctions à la fois d’une religion et à celles d’un parti, qui a sérieusement réfléchi à la manière dont cet enthousiasme de commande se mesurerait et à l’aide de quels moyens et méthodes ? Ces expressions cachent (au mieux) un manque ahurissant de discernement Marie-Laure Barbu Hervé Pagès EIM : les grands oubliés La mise en place de cet outil va également affecter ceux qui dirigent les EIM et ceux qui en relèvent. En effet, la DRH se trouvant de fait, reléguée au rang des accessoires, les EIM n’auront plus d’accès privilégié aux offres de postes, ce qui rendra encore plus difficile la réalisation de leurs missions de placement.
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